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Playlist 2020

Classements d'albums

1 juin 2006 4 01 /06 /juin /2006 14:05

2000 - DECCA ****

 Les chanteuses à voix… souvent ce qui se fait de pire. Sirupeuses, larmoyantes, kitchissimes, constamment dans l’emphase mielleuse et grotesque. Mais elles ne sont heureusement pas toutes pourvoyeuses d’insupportables mélasses gluantes. Il en est une qui tranche avec les autres, qui a un minimum d’ambition esthétique et de goût, qui est donc la meilleure alternative aux québécoises lourdingues… c’est l’allemande Ute Lemper. Elle n’est pas allée pour cet album (ni pour aucun de ses autres disques) demander des chansons à des Obispo, Barbelivien ou autres Goldman, mais, excusez du peu, à Tom Waits, Neil Hannon (Divine Comedy), Nick Cave, Scott Walker (qui a co-produit l’album), Elvis Costello et Philip Glass. Généreux, ils ne lui ont pas offert de chansons médiocres et poussiéreuses traînant au fond de leurs tiroirs, mais de vrais bijoux.

 

Le répertoire de prédilection d’Ute Lemper est celui de Brecht et Weill, et, comme Kurt Weill, son souci n’est pas de faire de la musique " savante " ou " populaire ", mais de la bonne. Et sur Punishing Kiss, pas de doute, c’est de la bonne…

 

Elle navigue ici avec succès entre les plus exigeantes des musiques pop et rock (Scott Walker, Nick Cave, Tom Waits…) et la plus " populaire " de la musique savante du XX° (Philip Glass, Kurt Weill). Les mélodies sont si belles, accrocheuses, émouvantes qu’elles peuvent séduire autant l’esthète que le profane. Même les ménagères de moins de 50 ans fans de Céline Dion, Fabian, Ségara & co pourraient se laisser prendre.

 

A la base, la raison pour laquelle je me suis lancé dans ce blog est le désir de faire découvrir des musiques à la fois exigeantes et accessibles, de m’adresser à ceux qui ne sont pas des " mélomanes avertis " pour leur proposer des alternatives à la " soupe populaire " que gerbent les radios et télés. Je me suis un peu éloigné de cette idée, la plupart des visiteurs étant plutôt des connaisseurs, mais je ne désespère pas de ramener quelques brebis égarés sur le droit chemin… Amen…

 

Punishing Kiss est ainsi très accessible… à condition de s’arrêter avant le dernier titre. Pourquoi ? Parce que c’est du Scott Walker dernière période, dans la lignée de ce qu’il fait depuis Tilt, avec nappes de cordes hallucinées et tétanisantes, expérimentations diverses, climat oppressant… Magnifique, génial, mais déroutant.

 

Quelques morceaux choisis de ce qu’a écrit Ute Lemper dans le livret :

 

The song of this album, written by Elvis Costello, Nick Cave, Neil Hannon, Joby Talbot, Philip Glass, Tom Waits and Scott Walker, are like contemporary Kabarett songs, theatrical and passionate.

Joby Talbot and his fantastic colleagues arranged most of the songs in a creative process with me, except for the two Tom Waits tunes and the work of Scott Walker.

What a joy to sings duets with Neil Hannon, whose voice is a real killer and makes me shiver. He also co-wrote three of the songs with Joby.

Besides being a real Costello admirer, I just love pulling them into my world. His poetry and composition are unbelievably sophisticated and complex.

Nick Cave’s Little Water Song is a jewel on this album. When I heard his demo cassette for the first time with just piano and him singing I was totally overwhelmed. The surreal text together with a rather minimalist melody make a real art song. Nick let us know that he wanted strings for this song. Joby arranged this most beautiful orchestral piece.

I was very surprised and grateful for Philip Glass’s contribution with Streets of Berlin. He originally wrote this song for the movie Bent, adapted from Martin Sherman’s play. […] We approached the song purposely not like a cabaret song, but as a more frightening, violent cry in the dark in today’s underground world of Berlin.

Scott Walker’s piece is an epic work. […] Scott was very clear with his directions. Imagine you would blindfold yourself and plug your ears in 100% darkness and silence, let thoughts go wherever they want to, the sound of your mind, your fears, the sound of images translated into subjectivity : that’s where Scott Walker’s music starts.

I am a Tom Waits fan, so anything I say about him sounds like worship of 500 miles high on good Bavarian grass.

 

Punishing Kiss est un somptueux album… la perfection n’étant pas de ce monde, quelques petits bémols :

 

Les arrangements sont formidables (Little Water Song, You Were Meant for Me, Scope J…)… mais plus faibles et convenus pour le très beau Tango Ballad de Kurt Weill. Certains trouveront peut-être aussi la prise de son de l’album un peu trop polissée…

 

Précisons pour conclure que l’édition française comporte un CD bonus avec trois titres de l’album repris en français, dont le morceau de Weill (chanté cette fois en duo non plus avec Neil Hannon, mais Arthur H), The Case Continues qui devient… L’Affaire Continue, et Little Water Song qui devient… Petite Chanson d’Eau.

 

Difficile de choisir un titre plutôt qu'un autre, ils sont tous très bons et ont chacun leur "personnalité" (l'album n'en reste pas moins très cohérent). Après de longues délibérations, j'ai opté pour le sublime Little Water Song de Nick Cave que je laisse en écoute ici.

 

Le site officiel d'Ute Lemper :

 

http://www.utelemper.com/

 

Ute Lemper – Punishing Kiss

 

1. Little Water Song   (Nick Cave / Bruno Pisek)
2. The Case Continues 
(Neil Hannon / Joby Talbot)
3. Passionate Fight  
(Steve Nieve / Elvis Costello)
4. Tango Ballad 
(Weill/Brecht) duo avec Neil Hannon
5. Couldn't You Keep That to Yourself  (Elvis Costello)
6. Streets of Berlin  (Philip Glass / Martin Sherman)
7. The Part You Throw Away 
(Tom Waits/K. Brennan)
8. Split  (Neil Hannon / Joby Talbot) duo avec N. Hannon
9. Punishing Kiss 
(Elvis Costello/Caït O’Riordan/Declan MacManus)
10. Purple Avenue  (Tom Waits)
11. You Were Meant for Me  (Neil Hannon / Joby Talbot)
12. Scope J  (N.S. Engel
[Scott Walker est son nom d’artiste])

 

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30 mai 2006 2 30 /05 /mai /2006 21:02

Beaucoup de bonnes choses sur the daily growl :

Une très belle chanson de Sufjan Stevens, Come Thou Fount of Every Blessing, 5 mp3 de l'excellent Richard Hawley, extraits de ses différents albums, et 4 mp3 de TV On The Radio (2 de leur nouvel album, 2 de leur précédent).

Sur Spread The Good Word, le blog du Révérend Frost, 2 très bons titres de Ole Sonny Boy et un mix de 42 minutes (17 titres !), A Bloody Evil Party Mix.

Sur My Old Kentucky, I'm not like everybody else des Kinks, Girl from the North Country de Dylan par Dylan, par Dylan & Johnny Cash, par Robert Plant, Eels et bien d'autres...

 

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28 mai 2006 7 28 /05 /mai /2006 21:53

Je n’étais pas à Cannes (personne n’a eu la riche idée de m’y inviter…) et n’ai donc pas vu les films projetés. Ce qui ne m’empêchera pas d’en parler. Ou plutôt de vous faire part d’une certaine perplexité face au palmarès. Les 4 films récompensés, Le vent se lève, Flandres, Volver et Indigènes ont tous en commun le fait de s’intéresser à des couches particulièrement défavorisées de la population. Et dans 3 de ces films, ils serviront de chair à canon. Ce qui est quelque peu dérangeant, ce n’est pas ces films en eux-mêmes, mais le cadre de leur diffusion.

Cannes, c’est évidemment la foire aux vanités, des actrices glamour qui prennent la pose dans des robes luxueuses et se noient dans des rivières de diamants, des " happy few " logés gratuitement dans de somptueuses suites d’hôtels, des stars et gens du cinéma qui gagnent des sommes astronomiques… et tout ce petit monde, après avoir minaudé sur les marches, se retrouve entre gens de bonne (et haute) compagnie dans de magnifiques salles de cinéma à regarder de pauvres miséreux se débattre pour survivre aux situations les plus tragiques…. avant de courir dans les fêtes dédiées à ces mêmes films se gaver de mets raffinés entre deux coupettes de champagne.

Tout ça n’est pas bien grave, mais laisse une impression bizarre. Impression d’être dans un livre de Science-Fiction, avec une humanité divisée en deux. Des ultra-favorisés, qui ont la gloire, la beauté, des métiers amusant, l’accès à toutes les richesses, se divertissent du spectacle de l’autre partie de l’humanité, les ultra-défavorisés, confrontés, eux, aux pires malheurs.

On parle souvent de la schizophrénie de Cannes, avec d’un côté le glamour, les starlettes, les " people " et de l’autre un cinéma d’auteur exigeant. On pourrait donc aussi parler d’une double schizophrénie, en ajoutant ce fossé entre deux mondes, celui " dans la salle " et celui " sur l’écran ". Ceux qui étaient dans la salle ont une vie tellement " irréelle " que le spectacle virtuel des défavorisés les ramènent à une certaine forme de réalité, leur permet de redescendre sur terre. Comme si les humains " réels " étaient en fait ceux sur l’écran, pas dans la salle.

Les ultra-favorisés regardent-ils le petit peuple comme ce dernier les observe, fasciné, via les magazines people ? Est-ce un nouveau genre d'exotisme ?

Marrant, en contrepoint, que Marie-Antoinette de Sofia Coppola, pourtant un des films les plus en vu et les plus apprécié des critiques, n’ait eu aucun prix. Car Marie-Antoinette, c’est finalement le reflet d’une grande partie des VIP du festival. Elle jouit d'incroyables richesses et privilèges, elle est observée en permanence par la foule… marrant aussi qu’une des principales critiques entendue au sujet de ce film à Cannes est qu'il manque d’authenticité. C’est sûr que la vie dans les palais du festival doit être tellement plus authentique. Une autre critique récurente est que Sofia Coppola ne montre rien de la révolution française, du peuple qui souffre. Entre deux louches de caviar, les festivaliers ont impérativement besoin de leur dose de misère humaine ? La culpabilité les ronge au point qu'ils ne peuvent se regarder dans un miroir et qu'ils se sentent obligés du coup de se donner bonne conscience ? 

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