J’aurais pu commencer 2015 (il était temps) avec le Ghostface Killah (encore et toujours !) & Badbadnotgood, ou A Place To Bury Strangers… deux excellents albums, intenses et homogènes, sans fautes de goût. Mais avec le nouveau Infected Mushroom, quelque peu inégal, il y a plus à défendre.
Friends on Mushrooms est impressionnant à plusieurs niveaux. Impressionnant de maîtrise, d’inventivité, d’énergie et de liberté. Peut-être même l’album le plus riche de ce début d’année (album un peu particulier, puisqu’il est en fait la réunion de 3 EP). Il pourrait sembler légèrement bourrin à qui l’écoute distraitement, mais il fait au contraire preuve d’une remarquable alchimie, cultivant autant le sens du détail que le souci d’une efficacité maximale. Cette dernière ferait d’ailleurs parfois penser à du Daft Punk (en bien, c’est-à-dire s’ils étaient vraiment barrés et s’ils ne s’étaient pas mis en tête de viser la ménagère de plus de 50 ans…)
Seulement, il y a un hic. Les rengaines assez pénibles des quelques morceaux chantés (plus le dénommé Kipod) plombent un peu l’ensemble. D’autant qu’elles sont presque toutes dans la première partie de l’album : Savant on Mushroom, Kipod, Rise Up (voire Now is Gold, pour lequel je serais plus indulgent) font partie des 7 premiers morceaux. Rien de très surprenant non plus de la part d’Infected Mushroom, ils nous ont habitué à cela depuis plus de 10 ans : après avoir été un des meilleurs groupes de trance, le duo israélien a cherché à se diversifier au début des années 2000, intégrant du chant, des instruments acoustiques, des solos de guitar-heroes… avec plus ou moins de réussite (plutôt moins à mon goût, je les préférais nettement lorsqu’ils restaient dans le cadre de la trance). Et pourtant, leur dernier album est sans doute leur meilleur, et mérite même qu’on leur pardonne ici ces quelques « fautes de goût » qui seraient rédhibitoires chez d’autres. C’est un album tellement hédoniste, ludique, virtuose et jubilatoire que tout leur est permis… alors pourquoi pas quelques gros refrains pop pour ados, si ça les amuse ? Un album très ambitieux par ses audaces, ses alliages sonores et sa profusion d’idées, mais qui ne cherche en rien à rivaliser avec les Autechre, Aphex Twin et Amon Tobin, le triple A de l’électro. Plaire aux plus pointus fans d’electro expérimentale, c’est vraiment pas leur problème. Et heureusement, au fond, qu’existe aussi cet entre-deux, heureusement que l’électro (voire la musique dite populaire) ne se réduit pas à des David Guetta d’un côté, et des Autechre de l’autre. Il y a parfois des Infected Mushroom au milieu, capables de séduire autant les amateurs de thèmes accrocheurs et morceaux qui sortent l’artillerie lourde, que les amateurs de titres plus exigeants, complexes et inventifs, le tout sans tomber dans l’écueil de l’album lisse et consensuel.
L'album sur youtube :
Au sein de cet album, un titre est pour moi un véritable chef-d’œuvre electro… peut-être pas le plus original de l’album, mais le plus abouti, un formidable trip électro de 10 minutes… à écouter, bien sûr, à fond :
Astrix on Mushrooms