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1 novembre 2006 3 01 /11 /novembre /2006 14:21

Clint Eastwood, dans la mémoire collective, restera à jamais associé à l’image du cow-boy des films de Leone : dur, viril, ténébreux, sûr de lui et de sa force, impassible et inflexible (image renforcée par la série des Inspecteur Harry qui suivra). Pourtant, dans Impitoyable (The Unforgiven, 1992), il se mettait en scène de manière tout à fait différente : un vieux cow-boy, ex-mercenaire craint par tous, maintenant retiré dans une ferme, dont la première apparition le présente vautré dans la boue à courir maladroitement derrière ses cochons. Puis, successivement,  il n’arrive plus à monter à cheval, a honte de son passé violent, choppe un gros rhume et se fait démolir sans résistance par un shériff autoritaire (même s’il se vengera à la fin).  

 

Dans Impitoyable, il déconstruit le héros qu’il interprétait chez Leone, et dans Mémoires de nos Pères, c’est à l’héroïsme en général et à la fabrication des héros qu’il s’attaque. Mais ce qui fait toute l’intelligence du film et de son propos, c’est de ne jamais être manichéen. Les soldats immortalisés par la célébrissime photo du drapeau planté sur Iwo Jima ne sont ni des héros, ni de cyniques imposteurs. Eastwood les observe avec beaucoup de subtilité. Ils parcourent les EU afin de récolter des fonds pour l’armée, manipulés par leurs supérieurs mais conscients de cette mascarade et mal à l’aise avec le rôle qu’on veut leur faire jouer. Pourtant, ils s’acquitteront de leur tâche - hantés par des flash-backs de la guerre - avant tout pour aider leurs compagnons restés sur le terrain. Un des propos forts du film, c’est de dire que certes, à la guerre on se bat pour son pays, mais surtout pour survivre et pour ses camarades, ceux derrière et devant soi.

 

Sans le vouloir, Eastwood déconstruit aussi la belle histoire racontée par Indigènes… car Indigènes parle de ces soldats maghrébins «  qui se sont battus pour la France  »… mais Eastwood nous explique qu’à la guerre, on se bat surtout pour soi et ses potes. Indigènes veut réhabiliter les anciens combattants… Mémoire de nos Pères ne cesse de répéter, par le biais des survivants, que les vrais héros sont ceux morts au combat. Je n’ai pas vu Indigènes, mais, comme tout le monde, j’en ai beaucoup entendu parler et n’ai pu échapper à la tournée de promo des acteurs. Si l’intention d’Indigènes est noble et à saluer, pas sûr que le film soit à la hauteur de celui d’Eastwood.

 

Mémoires de nos Pères ne tombe pas dans l’écueil du film à thèse, ce n’est pas un simple « film de guerre », mais avant tout un  film extrêmement émouvant. D’ailleurs, plus l’histoire avance, plus les scènes de batailles se font rares. Il y a bien dans la première partie une extraordinaire scène, intense, spectaculaire, terrifiante (celle du débarquement), sans doute une des scènes de guerre les plus réussie et fascinante que l’on ait pu voir au cinéma. Mais les nombreuses images particulièrement dures de cadavres et de blessés nous ramènent à intervalles réguliers à ce qu’est l’horreur de la guerre.

 

Le film de guerre est un genre qui semble tellement stéréotypé, avec ses grandes scènes de batailles, ses « On va les avoir ces salauds de japs, viets, boches (rayer la mention inutile) », ses « Continuez sans moi les gars, vous arrêtez pas, laissez-moi juste une dernière clope ». Pourtant les grands réalisateurs ont su transcender le genre et produire des classiques inoubliables : Apocalypse Now (Coppola), Les Sentiers de la Gloire et Full Metal Jacket (Kubrick), Platoon (Oliver Stone), La Ligne Rouge (Malick). On pourra désormais rajouter à cette liste Mémoires de nos Pères d’Eastwood.

 

J’ai un peu hésité à mentionner Il faut sauver le soldat Ryan de Spielberg. Film très réussi, il est vrai, mais peut-être un peu moins profond que les autres. Et j’ai longtemps eu du mal avec Spielberg (déjà, gamin, je n’aimais pas du tout E.T.) Mais depuis quelques années, Spielberg m’impressionne de plus en plus. J’ai trouvé sa Guerre des Mondes formidable et j’ai été totalement fasciné par Munich. D’ailleurs, Munich et Mémoires de nos Pères, les deux films qui m’ont le plus marqué cette année (en attendant les nouveaux Woody Allen, de Palma et Scorsese) sont pour l’un, réalisé par Spielberg, pour l’autre, produit par Eastwood et… Spielberg.      

 

Mémoires de Nos Pères (Flags of our fathers), de Clint Eastwood avec Ryan Phillippe, Paul Walker, Jamie Bell, Jesse Bradford, Adam Beach, Neal McDonough    

 

Le film est le premier volet d’un diptyque sur la bataille d’Iwo Jima, dont le second sortira début 2007, la bataille étant cette fois abordée du point de vue… japonais !


Filmographie de Clint Eastwood sur Allocine
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Bio (résumée) de Clint Eastwood chez Systool

 

Ma chronique de Lettres d'Iwo Jima

 

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23 octobre 2006 1 23 /10 /octobre /2006 12:41

Je sais, encore Morricone, mais je suis tombé par deux fois récemment sur une reprise le massacrant. Ce morceau, un des tubes de Morricone tiré de la B.O du film Sacco & Vanzetti, est à l’origine un « hymne pop » très 70’s chanté par Joan Baez. Mais des esprits tordus ont décidé de le reprendre à la sauce r’n’b, perdant toute la naïveté originelle qui faisait son charme pour en faire un titre putassier et racoleur. Si les voix noires ont la faculté d’apporter de la sensualité et du swing à des chansons plates et insipides, on en est ici bien loin. Mais il y a aussi eu sans doute pire… car dans ce beau pays qui est le nôtre, on a remplacé sur ce titre de la B.O. Joan Baez par… Mireille Matthieu (qui sortira d’ailleurs plus tard un album de reprises de Morricone…)

 

Pour ceux dont les oreilles ont été polluées par cette reprise, il est impératif de les décrasser avec l’original :

 

Here’s to you

 

Cependant, la B.O. ne se limite pas à ce « tube ». Morricone y livre plusieurs de ses facettes et réussit une œuvre à la fois très variée et organique.

 

Variée, parce qu’on y retrouve des chansons pop - un hymne entraînant (Here’s to you) et une ballade poignante (The Ballad of Sacco & Vanzetti) – une superbe mélodie instrumentale en ouverture (Hope of Freedom) et des titres inquiétants et dissonnants (In prison et The Electric Chair).

Organique… par l’instrumentation (notamment le son récurrent du clavecin, inhabituel pour un film où il n’est pas question de fêtes versaillaises en costumes d’époques) et surtout la reprise de la ballade. Elle apparaît 3 fois (avec des paroles différentes), modifiée à chacune par l’intégration des éléments qui caractérisent les instrumentaux la précédant.

 

La magnifique ballade originale (toujours chantée par Joan Baez) est la suivante :

 

The Ballad of Sacco & Vanzetti (je la laisserai en écoute un bon moment, les titres ci-dessous seront enlevés au bout de quelques jours)

 

 

Ensuite, lui succède l’instrumental angoissant In prison, avec son thème chromatique au clavecin et ses cordes saccadées et agressives. La ballade revient, cette fois acompagnée par le clavecin et les cordes en saccades. Son caractère en est considérablement transformé, la voilà maintenant sombre et tendue :

The Ballad part2

 

Puis de nouveau un instrumental, Sacco and his son, basé sur le thème de la ballade, avec des cordes lyriques et haut-perchées.  La ballade qui revient une dernière fois prend alors une nouvelle dimension. Elle devient éthérée, aérienne, génialement orchestrée et harmonisée (ceux qui connaîssent le très beau Vespertine de Björk ne pourront s’empêcher d’y penser) :

 

 

The Ballad part 3

 

 

Le film date de 1970, il a été réalisé par Giuliano Montaldo, avec Gian Maria Volonte (Vanzetti) et Ricardo Cucciolla (Sacco). 

 

 

Ennio Morricone – Sacco & Vanzetti 

 

1.  Hope for Freedom (02:26)

 

2.  The ballad of Sacco and Vanzetti: Introduction (00:42)

 

3.  The ballad of Sacco and Vanzetti: Part 1 (04:18)

 

4.  In Prison (02:04)

 

5.  The ballad of Sacco and Vanzetti: Part 2 (05:20)

 

6.  Sacco and His Son (01:45)

 

7.  The ballad of Sacco and Vanzetti: Part 3 (06:21)

 

8.  Freedom from Hope (02:00)

 

9.  Sentenced to Death (03:00)

 

10.  The Electric Chair (02:00)

 

11.  Here's To You: Introduction (00:35)

 

12.  Here's To You (02:31)

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16 juillet 2006 7 16 /07 /juillet /2006 16:26

Si, comme moi, vous n’êtes pas fana de films gore et d’horreur – sans être totalement réfractaire ni défaillir à la moindre goûte de sang -, si vous n’exultez pas à l’idée de voir une bande de cannibales irradiés par des essais nucléaires s’en prendre à une famille en vacances… ne fuyez pas pour autant cette Colline.

Bien sûr, c’est un film d’horreur sanguinolent, qui demande un cœur bien accroché… mais ce n’est pas que ça. Ou, du moins, c’est beaucoup mieux que ça. Je parlais il y a peu du dernier album de Venus, formidable sans pour autant révolutionner quoi que ce soit. C’est un peu dans cette lignée (même si la comparaison entre les deux est tirée par les cheveux) que se retrouve La Colline a des Yeux. Rien de véritablement novateur… cependant, la maîtrise, l’inspiration et l’efficacité en font un chef-d’œuvre du genre.

Tous les ingrédients habituels sont là… mais la mayonnaise prend comme jamais. Si le film est un pur produit américain, d’un genre spécifiquement américain, il est… réalisé par un français ! Un jeune français, Alexandre Aja, qui va aux EU faire un remake d’un film de Wes Craven (un des maîtres du genre), dépassant de loin l’original (de l’avis de la critique) et qui donne une véritable leçon de cinéma d’horreur à ses pairs, c’est assez remarquable. Avec le révérend Frost, cela fait donc deux français cette année qui viennent marcher sur les plates-bandes des américains sans avoir à rougir…

Après X-Men 3, La Colline a des Yeux est le second film cette année à mettre en scène des mutants. Mais au politiquement correct du blockbuster X-Men (il faut tolérer les différences, ne pas se laisser corrompre par ses " pouvoirs "…), La Colline a des Yeux oppose une amoralité sarcastique et jubilatoire. On n’essaie pas de comprendre " l’autre ", juste de le détruire. Et cela dans les deux camps. Ajoutons un démocrate allergique aux armes qui se transforme en boucher sanguinaire, une fillette qui fait dans l’eugénisme (par son sacrifice)… mais pas de quoi hurler à la propagande fasciste. Loin de là. Comme dans la plupart des films du genre, le mauvais esprit et la transgression sont la règle. Ce serait tout de même le comble que de demander à un film d’horreur d’être consensuel, pédagogique ou " bien-pensant ". Rien à voir non plus avec les films d’action hyper-manichéens et fascisants de série B où des héros body-buildés dessoudent à tout va au nom de la justice, de la vérité, du travail, de la famille, de la patrie etc,etc.

La Colline a des Yeux lorgne parfois vers le " film gore ", sans pour autant tomber dans le ridicule. Les films gore sont en règle générale à la fois répugnants, grotesques et drôles (pas toujours volontairement) et ne font qu’assez rarement peur. On les regarde plus avec un rictus de dégoût que tétanisé par l’angoisse. Les rictus de dégoût sont inévitables à la vision de certaines scènes de La Colline a des Yeux, mais l’effroi y est beaucoup plus présent et terrifiant. Ainsi, la première partie du film amène avec brio une intense sensation de malaise qui ne vous lâchera plus jusqu’à la fin.

Le film, donc, ne révolutionne pas le genre… mais le réalisateur, comme c’est souvent le cas chez les meilleurs, réussit à faire d’un handicap une force. Il est plus facile de susciter la peur au cœur de la nuit, dans un château des Carpathes, une vaste et sombre forêt, les brumes anglaises hivernales… pourtant, l’action se situe ici en plein jour, sous un soleil de plomb et dans le désert. Certes, une des scènes les plus éprouvantes se déroule pendant la nuit, mais elle est bien la seule. Un film d’horreur caniculaire… qui vous glacera le sang.

 

La Colline a des yeux ****
(The Hills have Eyes)
Alexandre Aja

 

Avec Aaron Stanford, Kathleen Quinlan, Vinessa Shaw, Emilie de Ravin, Dan Byrd, Robert Joy, Ted Levine.

Durée : 1h43
Sortie : 28 juin 2006

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