Thrash Metal 1986 - American Recordings *****
J'aurais bien aimé vous parler des très bons derniers albums de ces femmes subtiles et délicates : Marissa Nadler, Keren Ann ou Bebel Gilberto. Cette dernière, notamment, dont le Momento est un irrésistible album suave, sensuel et mélodieux... mais je ne sais pas pourquoi, alors que Fab et Thom en ont déjà parlé il y a quelque temps (cf. liens à la fin de l'article), l'élection de notre vénéré président m'incite plutôt à écrire sur Reign In Blood. Non pas que je veuille jouer les Cassandre et vous assurer que les cinq années à venir seront sanglantes (il existe tout de même un mince espoir que celui dont les amis disent que l'expression qui le définit le mieux est "il ne peut pas s'empêcher" arrive à se retenir d'appuyer sur le petit bouton rouge), mais le chef-d'oeuvre ultime du metal est ce qui existe de mieux pour défouler ses frustrations les plus violentes. Un tel condensé de haine, on n'avait jamais entendu ça avant, et ceux qui voudront aller plus loin après souffriront la comparaison avec Reign In Blood. Certes, on peut jouer plus vite, plus fort... mais des riffs, rythmiques et chants d'une telle efficacité, où chaque note suinte le mal, c'est indépassable. Beaucoup de groupes ont bien plus joué sur le satanisme que Slayer (tels les grotesques groupes de black metal et leurs déguisements d'halloween), mais ne vous y trompez pas, si le prince des ténèbres était une musique, il serait celle de Reign In Blood. La pochette le suggère, la musique le confirme. Pas de compromis, de nuances, de claviers moyen-new-ageux, de joliesse, pas d'intros en arpèges à la guitare acoustique, de solos tape-à-l'oeil, de ballades pour passer sur MTV, d'hymnes fédérateurs et sympas pour gros stades, bref, rien de ces clichés qui font partie du cahier des charges de la plupart des groupes de metal. Slayer fait passer ses concurrents pour des rigolos, et ses suiveurs pour... de vulgaires disciples. En moins de 30 mn, le rouleau-compresseur Reign In Blood détruit tout sur son passage. Un mélange de punk et de metal... mais jamais le punk n'a été aussi sauvage et hargneux, jamais le métal n'a été aussi puissant.
Reign In Blood est une bénédiction pour tous les psychopathes de la terre. Car leur folie - pas plus que la pédophilie ou le suicide - n'est génétique, contrairement à ce que voudrait nous faire croire qui vous savez, mais peut se soigner très facilement en administrant de régulières doses de Reign in Blood. Cet album fait ressortir ce qu'il y a de plus mauvais en vous, il incarne puis expulse vos sentiments les plus violents. C'est Reign In Blood qui a fait de moi l'être exquis que je suis devenu (le premier ****** qui ironise là-dessus dans les commentaires, je viendrais personnellement lui exploser sa **** **** de ****). Quand les pulsions les plus noires tentent de monter à la surface, une bonne dose de Reign In Blood est l'idéal pour les libérer et s'en défaire. D'ailleurs je ne saurais que le conseiller à notre bien aimé président, qui n'aurait plus besoin d'aller jouer les caïds en banlieue entouré de 300 CRS pour balancer des insultes à la populace et se sentir puissant. Un petit coup de Reign In Blood saura, une fois l'écoute terminée, l'apaiser et le rendre doux comme un agneau, fin prêt pour parler aux jeunes de respect et de fraternité plutôt que de karcher et de racailles.
Après, l'effet inverse est aussi à craindre. Reign In Blood peut réveiller le psychopathe qui sommeille en chacun de nous. Comme les électrochocs, c'est un traitement radical qui, selon les cas et les doses, soigne ou crame le cerveau. Un étudiant, sur les campus américains, qui se balladerait avec un flingue dans la poche et Reign In Blood dans son lecteur mp3, mieux vaut ne pas s'en approcher de trop près...
Si vous n'êtes qu'amour et bonté, cet album ne vous touchera pas. Il est l'album le plus "mauvais" de l'histoire. Mauvais - dans le sens de raté - pour ceux qui ne peuvent s'y plonger (et je les comprends) parce qu'il est trop brutal et violent, mais surtout mauvais dans le sens de "méchant"... en fait un terme bien trop faible pour le décrire. Haine, violence, noirceur, hargne... tous ces mots sont très en deçà de ce qu'il véhicule. C'est ce qui en fait une grande oeuvre musicale (la seule du metal, à mon avis), car elle va bien au-delà des mots, elle met en musique l'indicible, des pulsions enfouies trop profondément et trop extrêmes pour être nommées. Bach a su porter la spiritualité, le sentiment religieux à de telles hauteurs que les termes "spiritualité" et "sentiment religieux" semblent fades pour décrire les choeurs de ses Passions... il en est de même avec la violence et la haine pour Slayer.
Angel Of Death ouvre l'album magistralement, on se dit qu'après une telle déflagration sonore la tension ne peut que baisser... et pourtant, les morceaux se succèdent, implacables, avec une énergie qui ne retombe jamais. L'album a 21 ans, le groupe a vieilli, s'est un peu "empâté"... mais pas leur musique, toujours aussi tranchante et dévastatrice, comme le prouve cet extrait d'un concert filmé il y a quelques années :
Slayer - Angel of Death
Slayer - Reign In Blood
1. Angel Of Death
2. Piece By Piece
3. Necrophobic
4. Altar Of Sacrifice
5. Jesus Saves
6. Criminally Insane
7. Reborn
8. Epidemic
9. Postmortem
10. Raining Blood
Autres chroniques de l'album :
L'acheter sur priceminister