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18 mars 2007 7 18 /03 /mars /2007 22:55

Lettres d'Iwo Jima de Clint Eastwood, sortie 21 février 2007



Faut imaginer Clint Eastwood débarquant dans les studios hollywoodiens pour "vendre" son projet sur la bataille d'Iwo Jima :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- Deux films de guerre qui se suivent ? C'est un projet ambitieux, Clint, va falloir mettre le paquet ! Le premier doit être choc et spectaculaire, pour donner envie aux spectateurs d'aller voir le second.

- En fait, le premier sera plutôt mélancolique, assez lent, peu de scènes de guerres.

- Pas terrible, ça... bon, on verra donc le quotidien des soldats sur le champ de bataille, ça peut intéresser...

- En fait, ce sera en grande partie le quotidien de trois soldats retournés en Amérique pour récolter des fonds.

- Mmmm, pas génial... bon, si tu veux, on va faire un grand film patriotique où la nation entière se sacrifie pour aider les héros partis sur le champ de bataille. Pas très vendeur pour l'étranger, mais ça peut attirer du monde chez nous. Avec une musique grandiose composée par John Williams...

- Pour la musique, pas de John Williams. Je la ferai moi-même pour le premier, mon fils s'occupera de celle du second. Ce sera très simple, quelques notes de guitare acoustique et de piano. Et pas de gloriole dans le film, tout cela sera présenté comme une vaste mascarade.

- Un film engagé, à charge, une critique virulente du système... à la limite, ça peut susciter la polémique ce qui nous fera de la pub.

- Non, ce ne sera pas manichéen. Et je me focalise surtout sur les doutes et les émotions des personnages. 

- Là, on est mal. Le seul truc qui peut nous sauver, c'est un casting d'enfer. Tu penses à qui ? Brad Pitt, Matt Damon, Clooney, Tom Hanks ? 

- Plutôt des acteurs peu connus...

- On court à la catastrophe. Dis toujours, pour le deuxième film, qu'on voit s'il peut attirer les foules et compenser les pertes du premier. Il est impératif qu'il soit plus attractif et accrocheur. Un film alléchant et séduisant.

- Je pensais à une lumière assez terne, limite noir et blanc pour le second. Alors pour "allécher", c'est mal barré. 

- Limite noir et blanc ? Tu veux nous ruiner ? Il sera truffé de vraies grandes scènes de batailles, au moins, avec cette fois de vrais héros ?

- Pas vraiment. Je privilégie encore les doutes de soldats un peu "paumés" au milieu d'une guerre qui les dépasse.

- On est foutu. Notre seule chance, c'est qu'il puisse bien se vendre aux télés. Pour ça, tu connais la règle, une grande scène spectaculaire au tout début du film, que le spectateur reste scotché dans son fauteuil et ne zappe pas pour jeter un oeil aux programmes qui commencent sur les autres chaines

- Toute la première partie du film, ce seront exclusivement des dialogues. La première scène de bataille n'arrive que vers le milieu du film.

- Plus de doutes, tu veux nous couler. Mais pour ce deuxième volet, t'as tout de même prévu quelques stars !

- Les acteurs seront encore moins connus que les acteurs très peu connus du premier.

_ ????

- Ils seront tous japonais

- Quoi ? Tu plaisantes...

- Non, j'ai pas le choix, la guerre sera présentée du point de vue japonais

- Ah, OK, tu me fais marcher... rassure-moi, tu n'es pas sérieux ?

- Si ! Et, dernière petite chose... il sera en japonais sous-titré.

 

Difficile de trouver un projet moins vendeur (surtout pour les Etats-Unis) que celui d'Eastwood. Et pourtant, cela a donné deux films absolument magnifiques, le deuxième est peut-être encore meilleur que le premier. Du très grand cinéma, intelligent, émouvant, remarquablement réalisé. C'est aussi ça, ce qui distingue les grands réalisateurs des autres. Ils peuvent se lancer dans le projet le plus casse-gueule, ne pas hésiter à prendre tous les risques, et en faire une oeuvre formidable et accessible. Bien sûr, beaucoup de spectateurs ont les a priori du "producteur-type" caricaturé ci-dessus et craindront bêtement de s'enuyer. Tant pis pour eux, ils iront perdre leur temps devant Taxi 4 et rateront un vrai grand film.


Précédemment : ma chronique sur Mémoires de nos pères


Bio (résumée) de Clint Eastwood chez Systool

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23 février 2007 5 23 /02 /février /2007 13:54

Chef-d’œuvre absolu ou fumisterie expérimentale ? C’est la grande question qui anime les cinéphiles sur le web, et qui va même jusqu’à diviser les fans de Lynch. Inland Empire exige beaucoup plus du spectateur que Mulholland Drive ou Lost Highway – non pas que ces deux-là soient facilement compréhensibles – car il est plus lent, austère, et moins fourni en « scènes chocs ». La déception de certains, même parmi les fans de Lynch, est compréhensible… mais je ne la partage pas ! Quand certains spectateurs – il faut bien l’avouer – quittaient la salle, j’étais tellement fasciné qu'une alerte à la bombe ne m’aurait pas fait bouger d’un centimètre. Seul regret… devoir quitter la salle au bout de ces trop courtes 2h52...  

 

Ce n’est sûrement pas le film idéal pour découvrir Lynch, mais les inconditionnels (et c’est peu de dire que je le suis, je cherche actuellement un flingue pour récupérer mon DVD de Mulholland Drive prêté à un ami) se retrouvent en terrain connu (mystère, climat oppressant, superposition et indifférenciation de ce qui tient du rêve, du fantasme et de la réalité, thème du double, échec du rêve américain, failles temporelles, trauma).

Si l’image est moins séduisante et léchée qu’auparavant – DV, caméra à l’épaule – Lynch demeure un esthète incomparable, qui a toujours autant le sens du plan et de la mise en scène (à l’origine peintre, il voit le cinéma comme une suite de tableaux mis en mouvements), et un indépassable créateur d’ambiances.

Inland Empire est donc plus lent et austère que Twin Peaks, Sailor et Lula, Lost Highway ou Mulholland Drive, mais il gagne ainsi beaucoup en fluidité. Peut-être même un des films les plus fuide et cohérent de Lynch (si l’on exclut Elephant Man, Dune et Une Histoire Vraie – œuvres à part dans sa filmographie). J’en vois certains bondir devant leur écran… entendons-nous bien, par « cohérent » je ne veux pas dire qu’il s’agit d’une histoire linéaire, bien balisée et intelligible. C’est du Lynch, mieux vaut laisser son esprit cartésien au vestiaire. Là ou 90 % des réalisateurs nous prennent par la main, pour nous amener de A à C en passant par B, Lynch nous abandonne au milieu d’un labyrinthe, dispersant ça et là quelques indices qui généralement ne font que brouiller encore plus les pistes. Non, si le film est « fluide et cohérent », c’est parce que Dieu (enfin, Lynch, c’est du pareil au même pour moi) prend plus de temps qu’à l’habitude pour installer des situations, change moins fréquemment d’atmosphère, suit partout l’étonnante Laura Dern qui tient le film sur ses épaules (dans tous les sens du terme, elle est aussi co-productrice), et réussit à mêler image et son comme jamais. Ce qui est à mon sens la plus grande qualité d’Inland Empire.

 

Dire qu’il réussit à « mêler image et son comme jamais », cela revient à considérer Inland Empire comme le film le plus abouti de ce point de vue, pas que je franchis allègrement. Car Lynch est loin au-dessus de la mêlée lorsqu’il s’agit de conjuguer les deux (pas si étonnant pour un réalisateur qui est aussi peintre et musicien). Chez la plupart des réalisateurs, la musique illustre, accompagne le film, alors que Lynch en fait un matériau indissociable de l’image. Pourtant, il n’a pas travaillé cette fois avec Angelo Badalamenti, compositeur de la musique de beaucoup de ses films et dont les nappes sonores semblaient indissociables de l’univers lynchien. Il a lui-même composé quelques titres (comme il l’a fait précédemment ou en collaboration avec Badalamenti), choisit quelques chansons plus ou moins connues (Beck, Nina Simone) et, surtout, puisqu’il est question de Pologne, est allé piocher des œuvres de compositeurs polonais. Qui dit compositeur polonais dit Chopin. Mais trop évident, pas le genre de Lynch. Il s’est donc intéressé aux œuvres de compositeurs récents, Penderecki, surtout, ainsi que Lutoslawski et Boguslaw Schaeffer. De Penderecki, il n’a pas pris d’œuvres de sa « seconde période », les plus accessibles et modales - trop évident, pas le genre de Lynch – mais des œuvres très atonales et dissonantes (un beau pléonasme). Non pas la plus célèbre du genre, Threnos – trop évident, etc… - mais De Natura Sonoris I et II, Fluorescences for orchestra, Anaklasis et Als Jakob erwachte.

Penderecki comme « bande-son » d’un film de Lynch, c’est en fin de compte tout ce qu’il y a de plus logique… Car même dans sa période sérielle et atonale, Penderecki n’a jamais fait passer le sens avant les sens. Sa musique est très expressive, sensuelle, saisissante, et n’a pas besoin de manuel de décryptage pour être aimée et comprise (cela n’en fait pas pour autant une musique « facile » et accessible au premier fan de variétoche venu). Il est d’ailleurs le premier compositeur contemporain que j’ai écouté et apprécié, et je pense que beaucoup d’amateurs de musiques contemporaines dites "savantes" sont dans le même cas. Quand bon nombre de compositeurs contemporains et de cinéastes de films dits « d’auteur » privilégient les concepts, Penderecki et Lynch ont bien compris que la musique et les films ne peuvent rivaliser avec les livres sur ce terrain, mais ont la capacité de nous emmener vers un ailleurs bien plus passionnant en s’adressant directement à nos sens. Ce qui différencie Lynch de la plupart de ses confrères, c’est qu’il n’oublie pas que dans « film d’auteur », il y a surtout « film ».

Par contre, comble du comble, cette B.O. exceptionnelle n’est… même pas distribuée ! J’ai eu beau chercher sur le web, demander aux disquaires, impossible de la trouver. Il n’y a que par le p2p qu’on peut se la procurer (et encore, je n’ai pas trouvé de fichier qui contienne tous les titres).

 

A écouter :

 

Penderecki - De Natura Sonoris n°1


Détail des titres de la bande originale, ici.


[Si vous hésitez à y aller, si vous vous dîtes que vous attendrez qu’il sorte en DVD ou passe à la télé, je ne saurais que trop vous conseiller de le voir au cinéma, c’est une expérience visuelle et sonore qui se vit sur grand écran…]


Inland Empire
, de David Lynch

Laura Dern (Nikki Grace / Susan Blue)

Justin Theroux (Devon Berk / Billy Side)

Jeremy Irons (Kingsley Stewart)

Harry Dean Stanton (Freddie Howard)…
Sortie en salle le 7 février 2007  

 

Le précédent chef-d'oeuvre de Lynch sur priceminister : Mulholland Drive (DVD autour de 10 euros), ou sur cette fiche.

 

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7 février 2007 3 07 /02 /février /2007 22:27

 

 

 

.. 











Grand schizophrène, je trouve toujours un peu débile les très subjectifs classements et autres remises de prix pour « le meilleur album », « le meilleur film »… mais je ne peux m’empêcher de vous soumettre les miens. Je l’ai fait pour les albums, pas de raison que je ne le fasse pas pour les films.

Difficile de départager les 4 premiers de la liste, ce sont à mon sens 4 chefs-d’œuvre. J’ai mis Munich en tête, en ayant longuement hésité (je vous entends marmonner « y en a qui ont que ça à foutre »), parce que ça me fait tout de même un peu mal de mettre Spielberg devant Scorsese. Mais j’ai été tellement impressionné par Munich que je ne pouvais faire autrement, même si j’ai adoré les 3 qui le suivent.

 

D’ailleurs, j’ai aimé tous les films que j’ai vu l’année dernière. Aucune déception. Ou de très légères (Miami Vice, très bien, mais un peu en-dessous du précédent film de Michael Mann, le superbe Collateral). Même les gros films d’action que je suis allé voir à reculons m’ont agréablement surpris : je n’ai jamais été fana des James Bond, mais Casino Royale est d’une toute autre trempe. Mission Impossible 3 n’est pas le genre de film qui vous accompagne toute une vie, mais c’est une grande réussite dans le genre. Gamin, j’étais un inconditionnel de la bd X-Men, j’ai trouvé les 2 premiers films assez mauvais mais le 3, sans être un chef-d’œuvre, est pas mal du tout.

C’est aussi toute la « limite »  de ces classements, qui parlent sans doute plus à ceux qui les font qu’à ceux qui les lisent. Car Romanzo Criminale est sans conteste un meilleur film que X-Men 3, mais, parce que les X-Men ont bercé mon enfance et que j’étais heureux de les voir enfin assez bien adapté, il m'a plus marqué et il est mieux placé dans ma « liste ». Mais dans les adaptations cinématographiques de bd, genre qui donne en général de sacrés navets, il reste très en-dessous du surprenant V for Vendetta, un des chocs de l'année.

Sinon, pas vu le moindre film français. Aucun ne m'a suffisamment fait envie. Ce qui n'est pas le cas de Volver, Inside man, Scoop, Le Dahlia noir, que je regrette d'avoir loupé.  

 

  1. 1.     Munich
  2. 2.     Les Infiltrés
  3. 3.     Babel
  4. 5.     Le Caïman
  5. 6.     Good night and good luck
  6. 7.     V for Vendetta 
  7. 8.     Casino Royale
  8. 9.     Walk the line
  9. 10.           Le nouveau monde
  10. 11.    La Colline a des yeux
  11. 12.    Le Labyrinthe de Pan
  12.  13.           Le Prestige
  13. 14.    Marie-Antoinette
  14. 15.    Mission Impossible 3
  15. 16.    Miami Vice
  16. 17.    Silent Hill
  17. 18.    X-Men 3
  18. 19.    Les fils de l’homme
  19. 20.    Romanzo Criminale
  20. 21.    Syriana
  21. 22.    Isolation

 

 

Ce que je retiendrais surtout de ces nombreuses heures passées en 2006 dans les salles obscures :

- La qualité visuelle de Munich. Une texture, un grain exceptionnels, mais le film perdra sans doute pas mal en DVD ou à la télé…

- Di Caprio. Il me sortait par les yeux à l’époque de Titanic. Passé chez Scorsese (Gangs of N-Y, Aviator), il a pris une autre dimension et j’ai révisé mon jugement. Mais dans Les Infiltrés, il franchit encore un pallier et m’a bluffé comme aucun autre acteur cette année. Devant même ce remarquable Johnny Cash  que campe Joaquin Phoenix dans Walk the Line.

- Mémoires de nos pères et Babel, les deux films qui m’auront le plus ému.

- L’incroyable scène de débarquement dans Mémoires de nos pères.

- La subversion assez réjouissante de V for Vendetta (et de La Colline a des Yeux).

- La grande réussite de Good night and good luck et du Caïman, deux films politiques, intelligents et engagés… mais le tout avec beaucoup d’humour. Etonnant que ce Good night and good luck, qui a tout pour être austère (noir et blanc, tout se passe dans les bureaux assez peu glamour de journalistes, sujet politique)… mais les dialogues sont tellement fins et brillants qu’on passe une heure et demie avec le sourire aux lèvres, sans que cela nuise au message.

- L’ouverture poétique et fascinante du Nouveau Monde, sur le prélude de l’Or du Rhin de Wagner.

- La scène terrifiante avec le monstre dévoreur d’enfants, dans le Labyrinthe de Pan. Un monstre inoubliable, plus proche de peintures de Goya que des créatures habituelles du cinema d’horreur.

- Les scènes musclées et haletantes de Casino Royale.

- La traversée en hors-bord, de la Floride à Cuba, dans Miami Vice. Magnifique sur grand écran.

- Enfin, Le Prestige, dont les discours sur la magie sont une très belle métaphore de ce qu’est le cinéma.

 

2006 a été un bon cru, et 2007 débute en fanfare. Avec Apocalypto, un très grand film que je vous encourage d’autant plus à aller voir qu’il ne rencontre pas un gros succès en France (si les critiques sont enthousiastes sur un film de Mel Gibson, alors que tous auraient adoré pouvoir en dire le plus de mal possible, c’est qu’il est vraiment formidable). Un film intense, ambitieux, qui dit beaucoup de choses sur nos civilisations et sur nous-mêmes, captivant du premier au dernier plan.

L’année commence en fanfare, donc, avec l’excellent Apocalypto. Mais l’événement, c’est surtout Inland Empire, le nouveau Lynch, qui vient de sortir aujourd’hui. Je ne l’ai pas vu, mais je pourrais déjà lui attribuer le très prestigieux titre de « meilleur film de 2007 selon Art-Rock ». Titre qui fait de très nombreux envieux. Cate Blanchett, entre autres, m’a imploré de réserver ce prix au film de Soderbergh, allant jusqu'à chercher à me corrompre en me proposant des choses que je ne pourrais retranscrire ici sous peine de poursuites pour atteinte aux bonnes mœurs. Qu’elle arrête de me harceler, ce titre ira inévitablement à Inland Empire, impossible qu’il en soit autrement pour l’inconditionnel des univers lynchiens que je suis. Si le Lynch n’est pas à la hauteur – ce que je n’ose imaginer – je garde les coordonnées de Cate, sait-on jamais...

 

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