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16 janvier 2010 6 16 /01 /janvier /2010 20:05

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Il peut arriver à tout le monde d'en avoir marre des classements... oui, même à moi. C'est pourquoi, cette année, pas de véritable "classement des meilleurs films de 2009". Il y a une autre raison toute bête : entre Gran Torino et Tetro, je suis incapable d'en mettre un au-dessus de l'autre. Donc, plutôt qu'un classement au sens strict, un petit récapitulatif des films de l'année...


Trois films sur lesquels je n'ai aucune réserve, que j'ai trouvé admirables de bout en bout : Gran Torino d'Eastwood, Tetro de Coppola, et Looking For Eric de Ken Loach.

Gran Torino de Clint Eastwood. Du grand Eastwood, touchant, drôle, intelligent, un de ses tous meilleurs films, et peut-être même son meilleur. Je ne reviendrai pas dessus, j'en ai déjà parlé ici.  

Looking For Eric de Ken Loach. Voilà ce que l'on devrait appeler une "comédie populaire". Une vraie. Pas comme les conneries affligeantes que nous vomit le cinéma français si fréquemment et que l'on catégorise ainsi à tort. Très drôle, parfois même hilarant (sans chercher le gros rire gras et bête), Loach se montre parfaitement à son aise dans un registre plus "comique". Mais il n'abandonne pas pour autant ses préoccupations sociales. Et c'est bien là une des spécificités du bon cinéma anglais, savoir parler avec justesse des classes populaires, sans se montrer lourd, pathétique ou ennuyeux...  
  
Tetro de Francis Ford Coppola. L'excellente surprise de la fin d'année. On n'attendait plus grand chose du réalisateur de ces monuments de l'histoire du cinéma que sont Le Parrain et Apocalypse Now... on pensait que sa fille avait pris la relève, qu'elle serait, pendant les années à venir, LA réalisatrice de la famille, poussant papa à la retraite... mais le vieux lion prouve qu'on peut encore compter avec lui... et si le grand film signé Coppola de cette décennie n'était pas le pourtant  très bon Lost in Translation de la fille, mais le Tetro du père ? C'est mon avis, et je le partage... un film fort, émouvant, intelligent, et magnifique. Qui vient rappeler à ceux qui l'ont oublié que du très beau cinéma, visuellement, n'a sûrement pas besoin de planètes à la végétation luxuriante et de créatures bleues, le tout en image de synthèse et en 3D, mais peut se faire tout simplement en noir et blanc, avec juste trois magnifiques acteurs (les formidables Vincent Gallo, Alden Ehrenreich, Maribel Verdu) et, derrière la caméra, un type qui a un sens de la réalisation peu commun. Un film intimiste, modeste, mais du grand cinéma...

Pas loin derrière les trois films précédents :

Vincere de Marco Bellochio
Un Prophète de Jacques Audiard. 

Sans contestation possible, deux des films les plus marquants de l'année. Des films profonds, saisissants, parfaitement interprétés et maîtrisés (même si je trouve qu'il y a quelques longueurs au milieu de Vincere). Pas besoin non plus que je m'étende sur leurs qualités, la presse les a - justement - encensés.    

- Catégorie "Fidèle à lui-même"

L'Imaginarium du Dr. Parnassius. Du Terry Gilliam comme on l'aime (mais si vous n'aimez en général pas son cinéma, très peu de chances que celui-ci vous parle). Un conte foutraque, drôle, inventif et émouvant, avec en prime Tom Waits en satan, et le regretté Heath Ledger, toujours aussi remarquable... que l'on regrette, donc, d'autant plus. Trois acteurs pour le remplacer dans les scènes "derrière le miroir" (Johnny Depp, Jude Law, Colin Farrell) n'étaient pas de trop.

- Catégorie "Bonne surprise" 

Trois "films de genre", apparemment sans grandes ambitions, mais pourtant très réussis et bien plus malins qu'on aurait pu le penser :

Démineurs de Kathryn Bigelow. Un des meilleurs films de guerre de ces dernières années. "Film de guerre" n'étant pas ici forcément représentatif, on est loin des clichés du genre, des morceaux de bravoure et passages obligés avec le bruit et la fureur de grandes armées qui se rentrent dedans... dans ce film captivant et réaliste, tout se joue sur l'attente, le suspense, on ne se rue pas sur l'ennemi en mitraillant à tout va, mais on avance centimètres par centimètres pour désamorcer les mines. Tout cela sans temps morts ni sans s'ennuyer une seconde.    

District 9 de Neill Blomkamp. Drôle, très sarcastique, réaliste et particulièrement original, le film de SF le plus intéressant de l'année. Faut dire aussi que des films de SF intéressants, originaux et réalistes, ça ne court pas les salles obscures... 

Clones de Jonathan Mostow. Il y a des jours, comme ça, où l'on n'a pas envie de "grandes oeuvres", de profondeur, mais de distraction, et où l'on se dit "j'vais pas me prendre la tête, mais me vautrer devant un film de SF avec Bruce Willis"... pourtant, ce "Clones" est bien plus profond qu'il n'y paraît. Certes, ce n'est pas le film du siècle, il remplit son cahier des charges de poursuites, fusillades, retournement de situations parfois un peu convenus... mais le sujet est remarquable. Digne de la vraie bonne SF et des oeuvres de K. Dick, il nous interroge avec pertinence sur ce que nous deviendrons, et sur ce que nous sommes. Parce que dans nos sociétés où la popularisation des jeux vidéos, et, surtout, l'internet tendent de plus en plus à nous faire vivre dans le virtuel, l'évolution logique serait bien que les humains restent cloîtrés chez eux, connectés à un clone à travers lequel ils vivraient et ressentiraient. Des "avatars", en quelque sorte, bien plus intéressants que ceux de Cameron...     

Une autre bonne surprise : Les Insurgés de Edward Zwick. L'histoire, tirée de faits réels, de ces 3 frères juifs biélorusses qui vont se réfugier dans la forêt, aider leurs semblables et mener une guérilla contre l'envahisseur nazi est particulièrement émouvante. Ce n'est pas là non plus le film du siècle, rien qui, dans la mise en scène où l'écriture ne mérite de se relever la nuit, mais, au final, un film tout de même fort et très touchant, et c'est déjà beaucoup.    

Enfin, un très bon polar sud-coréen  : The Chaser de Hong-Jin Na... Prenant, éprouvant et remarquable dans le genre. Seule réserve : le film se complaît un peu trop dans le glauque, surtout à la fin.  

- Bons films

L'étrange histoire de Benjamin Button de David Fincher
Slumdog Millionaire de Danny Boyle

Du bon cinéma, capable de toucher le grand public sans le prendre pour un ramassis de crétins, des films vraiment réussis, avec une bonne réalisation et un bon scénario. Bref, aucune raison de bouder son plaisir.

Dans La Brume Electrique de Bertrand Tavernier. Quelques petites longueurs, mais un bon film, avec une atmosphère très réussie.

Bruno de Larry Charles. Certes, ce n'est pas le film du siècle... mais un film vraiment hilarant, jubilatoire, et assez trash... je ne me souviens pas avoir autant ri au cinéma depuis très longtemps...    

- Bien, mais peut mieux faire

Inglorious Basterds
de Quentin Tarantino. Je ne comprends pas ceux qui ont été déçus par Death Proof et emballés par Inglorious Basterds. Death Proof, c'est du Tarantino "pur jus", nerveux, jubilatoire, malin, cool et rock'n'roll, du Tarantino qui fait juste ce qu'il sait faire de mieux, sans rien de superflu... alors que Inglorious Basterds est une grosse machine plus ambitieuse, plutôt séduisante au premier abord, mais dont les rouages ne fonctionnent pas tous parfaitement. Des scènes inégales, quelques facilités, des passages comiques pas toujours drôles... ça reste un bon film, marrant, mais Tarantino nous a habitué à bien mieux.   
 
Public Enemies de Michael Mann. Dommage qu'il y aient quelques longueurs (notamment au milieu) et que le film manque parfois un peu de souffle... parce qu'il a tout de même pas mal de qualités. Mais de la part du réalisateur du superbe Collateral, on est en droit d'être plus exigeant. 

Les Noces Rebelles de Sam Mendes. Un bon film, sans nul doute, mais au bout d'un moment, les chamailleries du couple deviennent assez agaçantes... et la fin traîne un peu trop...

- Bien, mais sans plus

Paranormal Activity  Le film ne méritait absolument pas tout ce "buzz", depuis Blair Witch, on finit par avoir l'habitude du procédé en caméra subjective dans les films d'horreur. A la limite, l'originalité serait maintenant plutôt de refaire des films d'horreur sans caméra subjective. Rien de si terrifiant que cela ici, mais faut avouer que le film fonctionne assez bien.

- Pas si mal

L'enquête - The International de Tom Tykwer. Un polar qui n'est sûrement pas inoubliable, mais pas trop mal foutu. De toute façon, je ne peux pas être vraiment objectif sur un film avec Naomi Watts puisque, depuis Mulholland Drive, j'en suis tombé éperdument amoureux (mais non, chérie, je plaisante, ce sont les conneries que j'écris sur mon blog, tu sais bien qu'il n'y a que toi...)    

- Catégorie "Soderbergh"

Che 1 L'Argentin
Che 2 Guerilla
The Informant !


Steven, mon petit Steven... un type aussi intelligent que toi devrait savoir que la qualité passe avant la quantité !
Pas moins de 3 films de Soderbergh cette année, mais aucun qui restera. Trois films moyens (et je suis généreux pour le soporifique Che 2) ne valent pas un bon film.

- Sympa, mais pas si terrible que ça

Good Morning England de Richard Curtis. Il y avait pourtant tout pour me plaire : du rock 60's, de bons acteurs et, surtout, un rapprochement assez pertinent voire subversif, en creux, entre le pseudo "piratage" actuel et les vrais "pirates" du rock, qui ont permis au genre d'être écouté, de se populariser et de passer outre la censure. Diffusé sur des radios émettant depuis des bateaux échappant à la juridiction anglaise, le rock s'est joué des lois et règles pour se faire entendre. 40 ans plus tard, les rockeurs, ceux qui ont bénéficié de cette situation "illégale" pour voir leur genre musical se développer, poursuivent les types qui veulent faire écouter "illégalement" leur musique... 
Mais tout ça ne suffit pas à faire un bon film. Certes, le film est sympathique et pas déplaisant, mais un peu trop gentillet et mollasson, un comble pour un "film rock".      

Les 3 Royaumes de John Woo. Que dire... je ne sais pas trop, puisque j'ai quasiment tout oublié de ce film. La seule chose qui me reste, c'est l'accent porté plus que d'habitude dans les fresques de ce genre sur la stratégie militaire...

- SF, super-héros et conneries de ce genre

Depuis l'excellent The Dark Knight, on est en droit d'attendre plus du genre... mais rien qui ait été vraiment à la hauteur cette année.
Pourtant, les deux bd qui, dans les années 80, ont fait passer les comics dans une catégorie plus "adulte" et ont su convaincre les esthètes étaient The Dark Knight de Frank Miller et The Watchmen d'Alan Moore... les Watchmen ont été adaptés au cinéma cette année, Frank Miller a fait un film... mais si The Watchmen, sans être transcendant, est plutôt pas mal (on pouvait craindre le pire de la part du réalisateur de 300!, pompeux comme c'est pas permis), The Spirit de Frank Miller est vraiment raté, et même consternant par endroits, avec Samuel L. Jackson et Scarlett Johansson en roue libre... 

Terminator Renaissance de McG : visuellement, le film est plutôt pas mal, notamment par ce choix - audacieux pour un blockbuster -  d'une photo assez terne, grise, voire glauque, qui sied parfaitement à cet univers post-apocalyptique désespéré. Mais à part ça, rien de transcendant non plus ici.

X-Men origins : Wolverine de Gavin Hood. J'ai une bonne excuse pour être allé le voir, Wolverine était le héros de mon enfance. Mais je ne vois pas d'autres raisons de passer deux heures devant ce film...

Star Trek de JJ Abrams. Là, je n'ai aucune excuse, j'aimais déjà pas la série... enfin, c'est bien parce que c'est JJ Abrams que je me suis décidé à franchir le pas, et je le regrette. Cinq minutes de Lost valent 100 fois mieux que ce mauvais film.  
 
Avatar de James Cameron. Mouais... en 3D, sur grand écran, ça se laisse regarder, on en prend plein les yeux et on ne s'ennuie pas... enfin, si l'on accepte de laisser son cerveau au vestiaire.   

- Moyen

Walkyrie de Bryan Singer. Un bon sujet, mais le film n'est pas à la hauteur. Pas honteux ou nullissime non plus, mais trop de longueurs. 

- A éviter

Jeux de Pouvoir de Kevin MacDonald. Un film qui n'a de "jeux de pouvoir" que le titre. A croire que les scénaristes de ce film hyper convenu n'ont jamais regardé un épisode de 24, mais en sont restés à Derrick... 

- Film-étron

Tony Manero de Pablo Larrain. J'en ai vu, des conneries, mais je ne pense pas avoir jamais vu un film aussi chiant. C'est sans doute un concept, celui de "film-merde", d'autant plus que lors d'un des moments clés du film, le "héros" chie sur la veste d'un de ses concurrents. Tout est glauque et chiant dans ce film : les personnages sont tous plus antipathiques et creux les uns que les autres, la réalisation est fade et laide, le scénario indigent... et qu'est-ce que c'est mou... un étron mou...

- Hors-catégorie

Le Syndrome du Titanic
Capitalism : A Love Story


Des documentaires plus que des films, j'ai déjà dit
ici tout le bien que j'en pensais.

Enfin, 4 films que j'ai loupé, pas restés suffisamment longtemps à l'affiche chez moi : le dernier Jarmusch (la première fois que je loupe un de ces films, mais les critiques, mauvaises, m'ont un peu refroidi... et le temps que je me décide, il n'était déjà plus en salle), Le Ruban Blanc, Harvey Milk et Le Temps qu'il Reste... heureusement, ces trois-là ont été retenu pour le festival Télérama...

En guise de conclusion... dans les 5 films qui sont, à mon sens, les meilleurs de l'année, un thème se dégage très nettement : la quête du père. Non pas celle du "père absent" avec lequel on aimerait nouer des liens, mais plutôt celle d'un père dur et distant dont on souhaiterait qu'il nous accepte. C'est le cas de la relation entre le jeune Hmong et le personnage de vieux râleur joué par Clint Eastwood dans Gran Torino, de celle entre le jeune taulard et le parrain corse dans le Prophète, de celle entre le fils de Mussolini et son père qui ne veut pas le reconnaître dans Vincere, et c'est encore plus flagrant dans Tetro, puisque c'est à la fois la relation entre chacun des frères et leur père, mais aussi des frères entre eux. Et s'il n'y a pas de père véritablement "dur et distant" dans Looking for Eric, le héros, paumé, faible et déprimé, va trouver en Cantona un modèle de force, d'assurance et de confiance en soi, un "père" qui va le pousser à se faire violence et se dépasser.

La perte de confiance... voilà bien un des phénomènes majeurs de cette décennie en occident. Perte de confiance dans la sécurité (11 Septembre), dans la fiabilité du système (crise), de notre pouvoir d'action sur le monde (fiasco de la guerre d'Irak, Chine appelée à être la nation dominante dans le futur) et de notre propre survie (peur de catastrophes écologiques à venir). Pas étonnant que dans les films les plus marquants de cette fin de décennie on cherche avec un mélange d'attirance et de répulsion cette figure du père viril, dur, sûr de lui, que l'on pensait appartenir au passé (puisque le père moderne est censé être tendre, sympa, attentionné, changer les couches du bébé et jouer à la playstation avec ses enfants). S'endurcir pour survivre, en quelque sorte...  


Les films de 2008
Les films de 2007
Les films de 2006
   

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2 décembre 2009 3 02 /12 /décembre /2009 12:16

               


Il est de bon ton de taper sur Michael Moore. De faire la fine bouche et de le trouver démago, excessif, maladroit. Avec le Syndrome du Titanic, Nicolas Hulot s'est vu, lui, pas mal critiqué sur le caractère trop "déprimant" ou désordonné de son film. S'ils ont tout de même bénéficié de nombreuses critiques positives, il est pour le moins étonnant d'en lire certaines vraiment à côté de la plaque.
Dieu sait que l'esthétique, le style, ont une importance considérable pour moi.... mais devant de tels films, pinailler sur des questions formelles, de réalisation, de cohérence narrative, de mise en valeur de certains effets "spectaculaires" semble limite obscène. Ou, du moins, parfaitement décalé. Ce serait comme gloser sur la chevelure approximative et le costume mal taillé d'un type qui vient révéler un gigantesque scandale politico-financier. Car face à ces deux films les questions de style sont anecdotiques. Ils touchent à des choses véritablement essentielles, bien trop rare et précieux dans nos sociétés hyper-superficielles.        
Dans Le Monde, un critique blasé estime que "Si l'on s'est un peu intéressé aux événements financiers de ces derniers mois, la démonstration de Michael Moore n'apporte pas grand-chose de neuf". Je le plains sincèrement. Son film au contraire, nous en apprend beaucoup, car apprendre, ce n'est pas seulement collecter des infos... Tout le monde a entendu parler de la crise des subprimes, de ces gens expulsés de leurs maisons alors qu'ils ont trimé toute leur vie. Mais voir dans le film de Moore comment plusieurs familles l'ont vécu nous en apprend bien plus sur l'absurdité du système qu'un article du Monde, aussi détaillé soit-il. Certains pourraient penser "Bah, Hulot nous parle encore de désastres écologiques, de l'écart entre les pays pauvres et les pays riches, de la sur-consommation, Moore va nous en faire des tonnes sur les riches qui se goinfrent pendant que les pauvres trinquent... pas besoin d'aller perdre deux heures pour voir ça, on le sait tous..." Ils auraient tort. Car il y a un fossé entre voir et savoir, entre être au courant d'un phénomène et en prendre réellement conscience. Même lorsque l'on est parfaitement convaincu et bien informé sur ces sujets, ce sont des choses qui méritent d'être dites et redites, vues et revues. Dans ce monde de bruit et de fureur où tout le monde s'excite pour n'importe quoi, les oeuvres de Hulot et Moore sont salutaires, parce qu'elles, au moins, ciblent les vrais problèmes.  
Moore en rajoute parfois dans le pathos, avec des violons en fond sonore ? Il est trop vindicatif contre les grands patrons de la finance ? Mais tout ça n'est vraiment rien face à la cruauté de ce système, il aurait pu aller encore plus loin...
Certes, Michael Moore ne fait pas dans la finesse, ses films sont trop chargés, il use de grosses ficelles, passe des sujets les plus dramatiques à des épisodes comiques... ce n'est pas Raymond Depardon, mais lui cherche vraiment à toucher le plus grand nombre, pas une toute petite poignée d'esthètes exigeants. Et il a bien raison. Car ce qu'il dit, comme ce que dit Hulot, doit être entendu par le public le plus large possible (et malheureusement, le film de Nicolas Hulot n'a pas eu un grand succès, la faute en partie aux médias qui ont trop insisté sur son côté sombre et déprimant). Parfois, la fin justifie les moyens, et Capitalism : A Love Story est bien plus utile avec ses effets pas toujours très subtils, son rythme nerveux et son humour potache qu'un documentaire austère qui n'attirera que 2-3 enseignants. Tant mieux si les films de Moore sont plus divertissants et moins sérieux que les documentaires d'Arte (et encore, ça dépend lesquels), au moins, ils sont plus accessibles, le grand public sait qu'il ne va pas s'ennuyer deux heures à écouter les silences entre les mots.     
Appliquer les mêmes critères de jugement à ces films qu'à n'importe quelle oeuvre est absurde. Les films de Moore et Hulot remplissent parfaitement leur fonction : mettre nos sociétés face à leurs pires travers, leurs plus grandes injustices. Se focaliser sur la forme quand le fond touche à des questions aussi fondamentales, faut vraiment manquer sévèrement d'humanité et d'empathie.
Il est tellement facile, le cul confortablement assis sur sa chaise, de distribuer de bons et de mauvais points à Moore et Hulot, de jouer au critique "à qui on ne la fait pas". Mais c'est si petit, si mesquin à côté de ce que nous disent ses films. Bien sûr, on peut toujours discuter de leurs qualités, de certains raccourcis... mais avant toute chose, comment ne pas saluer le travail et l'engagement de Hulot et Moore, nécessaires comme peu le sont. Et si j'osais - et j'ose - je dirais que leurs films sont les deux seuls vraiment indispensables de l'année... pas simplement parce qu'à part Gran Torino et Looking for Eric, peu de films m'ont emballé, mais vraiment parce que rien, au fond, n'a autant d'importance que ce sur quoi ils mettent le doigt. Ils ont les défauts de leurs qualités, dans deux styles opposés (Le Syndrome du Titanic est grave, mélancolique, poétique par endroits, parsemé de doutes ; Capitalism : A Love Story est tonitruant, volontaire, rentre-dedans, drôle, speedé), mais se rejoignent parce qu'ils dressent deux portaits de notre monde à voir absolument.

Cette chronique, vite-faite, n'est sûrement pas ma meilleure, sûrement pas la mieux écrite... peu importe, là aussi, la seule chose qui compte vraiment, c'est de vous pousser - que dis-je, vous pousser... vous exhorter ! - à les voir...

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25 mars 2009 3 25 /03 /mars /2009 00:46

Gran Torino - Clint Eastwood            2009



Je ne comptais pas forcément parler de Gran Torino, qui a un beau succès public et critique et n'a pas besoin que j'y aille aussi de mes louanges... mais voilà, via le blog de Ska, je suis tombé sur un article des inrocks qui m'a consterné. Que l'on n'aime pas le film, qu'on lui trouve des défauts, pourquoi pas... encore faudrait-il que l'attaque soit justifiée et pas de la pure mauvaise foi comme c'est le cas dans l'
article de Jean-Baptiste Morain.
Si vous n'avez pas vu le film, je vous déconseille d'aller lire cet article où Morain dévoile la fin... ni le mien, car même si je ne dis rien du dénouement et ne reprends pas le passage de Morain le concernant, je livre pas mal d'éléments qu'il est préférable de découvrir dans le film. Parce qu'il faut aller voir ce film magnifique, peut-être même le meilleur de Clint Eastwood (et je ne dis pas ça juste parce que le titre du film a de très belles initiales...)

Morain dit :  Il n’est pas du tout évident que le metteur en scène Eastwood traite mieux les voisins asiatiques de Kowalski que ce dernier ne le fait au début du film. Il suffit de regarder les rares scènes où Eastwood acteur n’apparaît pas pour se rendre compte qu’elles sont faiblardes, assez mal filmées, sans rythme et surtout mal jouées [ce n'est pas du tout mon avis, je les ai trouvées très justes]. Dans les scènes qu’il partage avec certains d’entre eux, on constate tout de suite qu’Eastwood le cabotin a bien pris la peine de choisir des acteurs qui n’aient pas son talent naturel, sa présence.  

Tout d'abord... des acteurs qui aient le talent naturel et la présence de Clint Eastwood, qui soient capables de crever l'écran autant que lui... on pourrait attendre longtemps avant d'en trouver. Il aurait fallu demander à De Niro de jouer le rôle d'un ado asiatique ? D'autant plus que pour que le film fonctionne, cet ado doit manquer d'assurance, être introverti, un peu paumé... De Niro aurait pu le faire, sans doute, mais bizarrement, Eastwood a préféré donner le rôle d'un ado asiatique... à un ado asiatique. Quant au personnage de Sue, plus volontaire et dynamique, elle tient parfaitement tête à Eastwood...

Procès d'intention ridicule de Morain, qui veut nous faire croire qu'Eastwood, lorsqu'il fait son casting, a une chose en tête : que les acteurs soient suffisamment ternes pour ne pas lui voler la vedette. Qui sait, peut-être est-ce le cas ? Mais, à mon avis, Morain n'en sait pas plus que n'importe qui d'autre sur ce qui se passe dans la tête d'Eastwood au moment où il choisit ses acteurs...

Voir derrière cela un "racisme" d'Eastwood est particulièrement absurde, car les personnages blancs du film... ne lui volent pas plus la vedette.

 

Quant aux scènes qui montrent ses voisin[s] [ils n'ont personne pour relire les articles aux inrocks ?] Hmong préparer de la nourriture, elles noient tous les personnages en dehors du héros. Pas de réelle individualité : il y a Eastwood l’Américain d’un côté, les « bridés » de l’autre. Ou l’un parmi les autres.

 

On se trouve ici dans une communauté très soudée, normal qu'il y ait cette impression d'un collectif plutôt qu'une somme d'individualités... faire l'inverse aurait été stupide. Et si Eastwood n'est pas "noyé", c'est là aussi parfaitement justifié - en plus d'être inévitable - il fait tâche dans cette communauté, il est l'étranger... Morain ne l'a peut-être pas compris, mais le film n'a jamais prétendu être un documentaire sur la communauté Hmong, ce n'est pas le sujet.

Tous les jaunes se ressemblent, c’est bien connu, et c’est comme cela qu’Eastwood les filme.

Affligeant. Morain n'a pas dû rester longtemps dans la salle... il y a les "jaunes" voyous, le "jaune" introverti et touchant, la jolie jeune fille dont il est amoureux, la grand-mère râleuse, les ados (très différents de leurs parents), le "chaman", Sue, le Dr Chang... dans Gran Torino, "tous les jaunes ne se ressemblent pas", loin de là. Et si, dans la réception, Eastwood ne s'attarde pas sur chacun d'eux... c'est tout simplement parce que son personnage ne le fait pas, il n'est pas du genre à chercher à créer des liens avec chaque personne qu'il rencontre... ce que dit Morain est d'autant plus indéfendable que les blancs sont encore moins bien traités... Dans la réception des Hmong, Kowalski fait preuve d'un minimum de curiosité, alors que dans celle où sa famille et ses amis sont réunis, il râle, ne discute et ne regarde personne...  
D'ailleurs, s'il y a bien un "double" d'Eastwood dans le film, un personnage qui lui ressemble... c'est la grand-mère Hmong. Tous les jaunes ne se ressemblent pas, il y en a même qui sont plus proches de Kowalski que n'importe quel membre de sa propre famille.

Ensuite, il faut préciser que les Hmong du film ne sont pas des Chinois, mais des Laotiens, une ethnie qui a lutté du côté des Américains pendant la guerre du Vietnam après l’avoir fait du côté des Français pendant la guerre d’Indochine, et qui ont dû pour cela soit se cacher dans la jungle, soit se réfugier aux Etats-Unis. Dire donc que Kowalski met de l’eau dans son vin, qu’il se rédime et qu’il choisit l’intérêt de ses voisins étrangers contre celui de ses enfants n’est pas juste. Il accepte ces asiatiques quand il s’aperçoit qu’ils sont de son côté, qu’ils ont combattu du même côté que lui, et qu’il l’ont éprouvé dans leur chair. Ils ne sont pas autres. Ils sont « ses bons Chinois », comme on dit que tout antisémite a « son bon juif » ou son « bon arabe » - l’exception qui confirme la règle. 

Faux, et assez malsain comme analyse. Faux, parce que le personnage de Kowalski ne se met pas à les aider lorsqu'il apprend que les Hmong étaient du côté des américains pendant la guerre, il le fait - alors que rien ne l'y oblige - lorsqu'il aperçoit de sa voiture Sue entourée de voyous (on peut toujours supposer que la première fois où il leur vient en aide, c'est juste pour protéger sa pelouse).
Contrairement à ce que dit Morain, dont l'article à charge est bourré de procès d'intentions, que les Hmong aient aidé les américains est un élément qui vient bousculer et ridiculiser les préjugés racistes de Kowalski... qui aurait préféré voir dans tous les asiatiques des "ennemis".
Reprocher à Eastwood (le réalisateur) de penser que "tous les jaunes sont pareils" et que de "bons chinois" seraient à sortir du lot parce qu'ils ont aidé les américains... on croit rêver face à tant de mauvaise foi. Dans l'essentiel des films américains, dès qu'on voit un asiatique, soit il fait du karaté, soit il est derrière son écran d'ordinateur... pas de karaté ni d'ordinateurs ici. S'il y a bien un réalisateur américain qui, ces dernières années, a donné une place de choix aux asiatiques dans ses films, c'est Eastwood avec Gran Torino et le superbe Lettres d'Iwo Jima. Est-ce que Morain à entendu parler de Lettres d'Iwo Jima ? Eastwood a réalisé un film comme on n'en voit jamais aux EU, un film de guerre qui se situe uniquement dans le camp des "ennemis des américains", où tous les acteurs sont japonais, et où l'on parle japonais du début à la fin (ce qui est très casse-gueule aux EU, d'autres réalisateurs, s'ils avaient eu le courage et l'ouverture d'esprit pour faire un tel film, auraient au moins choisi de les faire parler anglais). Il y a tellement de réalisateurs de gauche à Hollywood... sans parler de la France... mais aucun n'a jamais su rendre un tel hommage aux "ennemis".   

Pour Eastwood, le danger vient des fils, jamais des pères. Les fils sont intéressés, idiots, gros et laids, ne pensent qu’à la respectabilité, là où les pères ne seraient que minceur, loyauté et responsabilité. Comme si, comme tout bon égocentrique qui se respecte, Eastwood ne supportait pas que les fils puissent un jour prendre sa place. 

Si les fils de Kowalski sont ainsi dans Gran Torino... c'est tout ce qu'il y a de plus logique. Face à un père aussi dur, irascible, froid, droit dans ses bottes, intransigeant, les fils ne pouvaient que prendre le chemin inverse. On imagine bien à quel point leur enfance a dû être difficile avec un père pareil, et on comprend parfaitement qu'ils aient cherché le confort d'une petite vie tranquille. Kowalski lui-même reconnaît qu'il a été un mauvais père.
Quant à Kyle Eastwood, le fils de Clint... il a joué, jeune, dans les films de son père, ce père qui lui a transmis sa passion du jazz au point tel qu'il en est devenu musicien... et son père fait, encore une fois dans Gran Torino, appel à lui pour ses B.O.   

 

Alors pourquoi crie-t-on au génie devant un film qui clame que tous les Le Pen du monde peuvent connaître la rédemption ? 

Un "Le Pen" ? Alors toute femme qui parlerait de fraternité serait une "Royal" ? Tout homme préoccupé par le sort de la planète serait un "Mamère" ? Mouais...

Et si l'on crie au génie devant ce film, c'est peut-être parce que tout le monde ne regarde pas un film uniquement avec de petites oeillères idéologiques, et peut se rendre compte que ce film est magistral, émouvant, intelligent, sensible, drôle, juste, fort, humain et parfaitement raconté...

(Gran Torino est un film qui met de bout en bout les rieurs de son côté et leur permet d’exprimer sans remords ni conséquence leur racisme larvé)

Ridicule. Après tous ces procès d'intention faits à Eastwood, voilà qu'il s'attaque aux spectateurs et prétend décrypter ce qu'il se passe derrière les rires. Mais les choses sont bien plus subtiles que cela, lorsqu'on est capable de mettre de côté ses dogmes idéologiques. Les vannes racistes "désamorcent", elles ont - entre Kowalski et le coiffeur italien ou le chef de chantier irlandais - un caractère totalement inoffensif, le rire est même ce qui leur permet de communiquer, de vider de leur potentiel agressif leurs préjugés racistes. Lorsqu'un italien et un polonais sont capables de se chambrer sur leurs origines sans haine et sans se foutre sur la gueule, lorsque ça n'est plus qu'un jeu, l'essentiel du travail d'ouverture à l'autre est déjà fait. Ce ne sont pas les vannes racistes en elles-mêmes qui sont drôles, c'est de voir ces types se balancer des horreurs alors qu'au fond, ils se respectent et s'apprécient.
Quant aux insultes d'Eastwood contre les Hmong... on ne rit pas là encore forcément par "racisme larvé", mais surtout parce que le personnage est drôle, parce qu'au cinéma, un incorrigible vieux bougon qui râle contre tout, qui ose s'adresser de manière aussi cassante à ses interlocuteurs, c'est drôle... on rit à ces insultes comme on rit lorsqu'il envoie balader les membres de sa propre famille... Alors peut-être que certains "rieurs racistes" ont pu se dire pendant le film "ah ah ah, qu'est-ce qu'il leur envoie à ces sales chinetoques..." mais on ne peut rien y faire, ça va à l'encontre du propos du film, et faut être dans un "politiquement correct" extrémiste pour voir le mal dans ce film qui est une ode à la tolérance et à l'ouverture aux autres communautés. Si on va par là, faudrait aussi taper sur le moindre film où un noir se fait descendre, parce qu'un raciste dans la salle pourrait toujours se dire "bien fait pour ta gueule, sale négro"... 

Voilà où mène l'absurdité du politiquement correct extrémiste... si on suivait la logique de Morain et des obsédés du politiquement correct, le film qu'Eastwood aurait dû faire (en partant de l'idée d'un vieux raciste qui va au fur et à mesure apprendre à connaître et apprécier des asiatiques qui s'installent près de chez lui) serait le suivant :
Un vieil homme dont la femme vient de mourir... ses fils sont tous super-cool, histoire de ne pas laisser penser qu'il y ait une "haine des fils"... des asiatiques viennent s'installer près de chez de lui... pas question qu'il sorte des vannes racistes, cela pourrait amuser des fachos dans la salle, mais faut bien montrer qu'il a des préjugés racistes... donc, les quelques fois où il balancera des insultes, son visage se déformera de manière hideuse, avec des violons flippants à la Psychose en fond pour qu'il n'y ait pas la moindre ambiguïté. Pas de "petite fiotte" et d'injures homophobes non plus... le film manque d'ailleurs de gays, il faudrait ajouter un personnage de gay sympathique et pas caricatural...
Lorsque Kowalski sera invité à une fête de la communauté Hmong, elle devra durer près de 35 minutes, il faut qu'il s'intéresse à chacun des personnages... par exemple, Sue les présentera tous à Eastwood... elle ne se contentera pas de donner leur nom et leur profession (sinon, on pourrait imaginer que les individus se réduisent à cela), ils viendront chacun raconter leur histoire et parler de leurs désirs, de leurs rêves, leurs souffrances... 
Le jeune Tao se fait emmerder par des voyous... attention, pas de manichéisme, il ne faut surtout pas laisser à penser que ces voyous le sont parce qu'ils sont naturellement mauvais, mais montrer avec de fréquents flashbacks que leurs tendances délinquantes sont le fruit d'un malaise social, de la pauvreté, de la misère, de leur enfance difficile etc...
Pas question non plus que Kowalski aide trop les asiatiques, ce serait faire croire qu'ils ont besoin des blancs... il ne sera que spectateur, les Hmong se débrouilleront très bien sans lui, et c'est même Sue qui règlera leur compte aux voyous... Kowalski se fera violer par le gang de chinois, et elle ira leur faire la peau, pour montrer qu'une fille peut bien être la "femme de la situation". Penser aussi à prendre des acteurs asiatiques d'1,90 mètres, on ne doit pas avoir l'impression qu'ils sont petits à côté du grand Clint, faut qu'ils lui parlent "d'égal à égal".
Et c'est quoi, ces codes macho, l'obsession pour la bagnole qu'est la Gran Torino, le bricolage, le chantier comme premier job... la transmission du vieux au jeune se fait de manière beaucoup trop phallocratique. Kowalski lui présentera un ami qui tient un institut de beauté, après tout, un homme peut très bien y bosser... plutôt que le bricolage, Kowalski commencera par lui enseigner l'épilation du torse, l'utilisation de crèmes de jour... 
Quant à l'objet du désir et de la transmission, plutôt qu'une bagnole, choisir un téléviseur plasma Samsung ps58a676... ce beau film totalement politiquement correct s'appellera donc Samsung ps58a676.

C'est tout de même un comble de trouver, face à un film déjà très "bien pensant" (puisqu'il est question de montrer que rien n'est jamais perdu, qu'un vieux raciste peut apprendre à s'ouvrir aux autres et revoir ses préjugés), des extrémistes du politiquement correct pour lesquels ce n'est toujours pas assez.

Ce que ne dit pas Morain et qui est bien plus intéressant dans Gran Torino, est cette idée capable de déranger autant les racistes que les adeptes du politiquement correct : les vieux réacs, en fin de compte, sont bien plus proches idéologiquement de bon nombre d'immigrés que de leur propre famille. Une réalité dont on parle assez peu... mais, de manière un peu caricaturale pour un vieux réac, entre son petit-fils, jeune homme "moderne" qui ne veut pas se salir les mains dans un boulot épuisant, qui pense que les couples gays devraient pouvoir se marier et adopter comme les autres, qui a intégré une certaine "indifférenciation des sexes" et pense que l'éducation des enfants et tâches ménagères sont autant le rôle des hommes etc... et un immigré attaché à des valeurs traditionnelles et principes rigides, il est évident que le vieux réac est bien plus proche de l'immigré que de son propre "sang".

Dans GranTorino, Kowalski sent bien qu'il n'a rien à "transmettre" à sa petite-fille pourrie-gâtée, le mur qui existe entre elle et lui est bien plus infranchissable que la barrière qui le sépare de la communauté Hmong...

Pour terminer sur les dernières énormités de Morain : qu’on pardonne tout à Eastwood parce qu’on aime l’aimer (c’est effectivement un grand cinéaste) et parce qu’en France on n’aime pas autant d’Américains que cela (il y a Obama, certes, mais c’est très récent). On peut légitimement se poser la question : est-ce qu'on aimerait autant le film d’Eastwood s'il était français ? Ne lui pardonne-t-on pas tout (son idéologie de beau pépé égotiste) sous prétexte qu'il est américain, et donc naturellement réactionnaire ? Clint Eastwood nous donne bonne conscience. 


- Je me tiens à l'entière disposition de Morain pour lui filer une centaine d'exemples d'américains qu'on aime plutôt bien en France, de Dylan à George Clooney en passant par Scorsese, Tarantino, Woody Allen, Sean Penn, Bret Easton Ellis, Al Pacino... que ce soient dans les films, séries, la musique, la littérature... on les apprécie tout de même pas mal. Il devrait le savoir, il officie dans un magazine où se dit beaucoup de bien de nombreux artistes américains...
- On aimerait Eastwood parce qu'il représente l'américain réac' ? J'ai une explication bien plus simple : on aime Eastwood parce qu'il est un grand réalisateur et un grand acteur. De plus, il a beau être républicain dans un milieu très démocrate, c'est un personnage bien plus complexe que ne le pense Morain, capable de menacer Michael Moore pour avoir piégé Charlton Heston d'un côté, militant anti-chasse, opposé aux armes à feu et fervent écolo de l'autre. Ces quatre dernières années, Eastwood a réalisé un film qui démonte l'héroïsme (Mémoires de nos Pères), un film en japonais qui relate la guerre du point de vue des adversaires des américains (Lettres d'Iwo Jima), un film où un vieux raciste va s'ouvrir aux autres et apprendre la tolérance (Gran Torino)... et le sujet de son prochain film, prévu aussi pour cette année (il est décidément très prolifique) sera... la fin de l'Apartheid (The Human Factor). Je ne vois pas de réalisateurs français ou américains de gauche qui aient, dans de grands films, autant mis à mal les valeurs réactionnaires bushistes et les préjugés racistes qu'Eastwood ces derniers temps...

L'article de Ska : Du "vigilante"... (Gran Torino vs The Watchmen)

L'article de Dr. F : Gran Torino / The Wrestler vs Death Wish 3/ Rocky

 

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