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29 septembre 2007 6 29 /09 /septembre /2007 12:37

Hip-hop      Slam Jamz Recordings - 2007 ****


public-enemy-how.jpgOn aurait pu dire de ce nouveau Public Enemy "le groupe phare des débuts du rap n'est plus que l'ombre de lui-même, il se contente de repiquer les recettes des nouvelles stars du genre".
 On aurait pu dire avec ironie que tout est dans le titre, que le groupe emblématique du rap radical et engagé a vendu son âme, qu'il a si peu d'inspiration et de fierté qu'il pompe allègrement les éléments qui ont fait le succès d'Eminem (Sex, drugs and Violence), 50 cent (Amerikan Gangster), avec de grosses guitares bien lourdes (Black is Back, Frankenstar) pour racoler les amateurs de rock, le très nostalgique A long and whinning road pour tirer les larmes de la ménagère et même un titre d'abstract hip-hop pour conclure l'album (Eve of Destruction), afin de séduire aussi les amateurs de rap actuel plus exigeants. Bref, un album qui bouffe à tous les rateliers, histoire de ratisser large. On aurait pu voir en Flavor Flav le symbole de cette déchéance, un Flavor Flav prêt à tout pour continuer à "exister", n'hésitant pas à déballer dans une émission de télé-réalité ses problèmes de "sex-addict"... et le fait que sur deux des trois titres chantés en solo par Flavor Flav, il martèle son nom pendant le refrain en serait la meilleure illustration.
 
On aurait pu... mais on ne le dira pas. Pour une simple et bonne raison : cet album d'une efficacité redoutable et son irrésistible énergie emporte tout sur son passage. L'inspiration et l'intensité, Public Enemy en a toujours à revendre. On n'a donc pas affaire ici à un énième groupe has-been pathétique - comme le rock en connait tant - qui s'approprie ce qui marche pour tenter de retrouver une gloire passée... mais à un groupe qui donne une vraie leçon de rap à tous les petits jeunes du moment, capable d'intégrer avec pertinence les éléments les plus modernes du rap à sa musique, montrant qu'il faut toujours compter avec lui et qu'il n'est pas près de céder son trône. Le morceau titre, qui ouvre l'album, fait taire d'emblée tous ceux qui pensaient que Public Enemy était de l'histoire ancienne. Du Public Enemy en très grande forme, puissant et rageur, et, à mon sens, un des tous meilleurs morceaux de rap de ces dernières années. Suivent le très musclé Black is Back et le single Harder Than You Think, efficace, certes, mais avec des cuivres un peu trop triomphants à mon goût pour être honnêtes... après cette entrée en matière fracassante, les ambiances se feront plus diversifiées, chacun pouvant trouver son compte dans cet album d'une grande richesse. 

S'il fallait mettre un bémol - quoique je viens déjà d'en mettre un petit sur les discutables cuivres triomphants du single - disons qu'on aurait pu attendre de Public Enemy une oeuvre plus radicale... mais ce qu'ils perdent en radicalité, ils le gagnent en diversité et en accessibilité. Cela fait de How you sell Soul un album idéal comme "porte d'entrée" dans le monde du hip-hop. Fear of a Black Planet ou It takes a Nation of Millions to hold us back resteront bien évidemment comme plus essentiels dans l'histoire du rap (en même temps, très peu d'albums -pour ne pas dire aucun - le sont autant que ces deux-là)... mais il est plus difficile d'y pénétrer pour des oreilles d'habitude frileuses quand il s'agit de rap. Par contre, How you Sell Soul a toutes les qualité requises pour conquérir un plus vaste public. Les rares déçus par How you Sell Soul seront sans doute quelques "fans hardcore" de Public Enemy... mais pourquoi bouder son plaisir, face à des titres aussi réussis et accrocheurs ?   
D'ailleurs, cet album est aussi la preuve - si besoin était - qu'il y a quelque chose de vraiment pourri dans le royaume du music-business. Oui, je sais, j'enfonce la plus grande des portes ouvertes. Mais un album pareil, c'est un des événements musicaux de l'année. Un groupe de légende qui ne s'enferme pas dans sa tour d'ivoire mais livre un album d'une très grande qualité truffé de titres imparables, sans rien de la putasserie du pseudo r'n'b que nous vomissent les ondes à longueur de journée, ça se fête. Pourtant, How You Sell Soul a été sorti relativement discrétement, en plein mois d'août, alors que les majors nous survendent tout et n'importe quoi toute l'année durant. Une profonde injustice - d'autant plus stupide que cet album, très nettement au-dessus du lot, a tout pour être un best-seller - injustice qu'il convient de réparer au plus vite en se procurant ce grand cru des indispensables Public Enemy. 

En extrait, le très "eminemien" Sex, Drugs & Violence, titre assez surprenant sur un album de Public Enemy, mais peu importe, c'est un excellent morceau :

Sex, Drugs & Violence


Public Enemy -  How You Sell Soul To A Soulless People Who Sold Their Soul 

1. How You Sell Soul To A Soulless People Who Sold Their Soul
2. Black Is Back
3. Harder Than You Think
4. Between Hard And A Rock Place
5. Sex, Drugs & Violence (feat. KRS-One)
6. Amerikan Gangster (feat. E.Infinite)
7. Can You Hear Me Now
8. Head Wide Shut
9. Flavor Man
10. The Enemy Battle Hymn Of The Public
11. Escapism
12. Frankenstar
13. Col-Leepin
14. Radiation Of A RADIOTVMOVIE Nation
15. See Something, Say Something
16. Long And Whining Road
17. Bridge Of Pain
18. Eve Of Destruction  

Lire la chronique de l'album chez Systool 

Chronique de l'album de DJ Spooky et Dave Lombardo, Drums of Death, avec Chuck D. (Public Enemy) chez
Nyko

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27 avril 2007 5 27 /04 /avril /2007 14:22

Hip-Hop       1990 - Def Jam *****

Le point commun entre le be-bop, Steve Coleman, et Fear of a Black Planet de Public Enemy ? Rendre la musique plus "noire", voire même écarter le public blanc.

Le be-bop est la révolution esthétique la plus importante de l'histoire du jazz. Les noirs-américains des années 40, frustrés des constantes discriminations et inégalités sociales alors qu'ils envoient en masse les leurs mourir à la guerre "pour la patrie", commencent à affirmer clairement leur mécontentement. Ils revendiquent le droit au respect... et les jazzmen ne seront pas en reste. Il fallait en finir avec les big-bands swing, destinés à faire danser les blancs, car les musiciens jazz en ont assez de jouer les "faire-valoir". Ils vont abandonner ces grands effectifs, accélerer les tempos de telle sorte que cela devienne "indansable" pour les blancs, et complexifier considérablement leur musique, histoire de prouver qu'ils sont de grands musiciens dont l'art n'est pas un art "mineur".

  

Le jazz est devenu, depuis la fin de l'ère free-jazz, plus lisse, acceptable, taillé pour les "élites" blanches. Mais Steve Coleman, grand militant pour la cause noire, a une démarche qui rappelle par certains côtés celle du be-bop. Des emprunts au hip-hop (particulièrement sur un album dont j'ai déjà parlé, The way of the cipher), une musique intense, où le rythme et le groove sont mis à l'honneur. Mais un grove dense, sombre, rien à voir avec le groove putassier du r'n'b actuel. Il en est de même avec ce Fear of a Black Planet, sans doute l'album le plus "noir" et groove de Public Enemy, symbole vivant du rap engagé et contestataire. Très peu des quelques éléments rock présents dans leurs autres albums, des samples et lignes de basses hérités du funk (mais un funk souvent plus martial et tendu que festif), des sons qui fusent dans tous les sens, illustrant cette idée de "jungle urbaine" que l'on retrouvait dans certains orchestres de jazz... bref, leur musique est noire, et fière de l'être. Cette imparable machine à groover est aussi... particulièrement éreintante. Comme le bop - trop rapide et riche pour les blancs en quête de musiques agréables et divertissantes - Fear of a black planet est bien trop épuisant pour un auditeur lambda (c'est pourquoi je le prenais comme référence en parlant de l'excellent dernier album d'El-P). Sans concessions, cet album-manifeste ne chercher pas à rallier à sa cause le grand public, il s'adresse à tous ceux qui ont la rage au ventre et l'énergie suffisante pour ne pas décrocher, exténués, après quelques titres. Et ils sont nombreux, comme le prouvent la fascination qu'il suscite et sa place déterminante dans l'histoire des musiques populaires modernes (un Never Mind the Bollocks pour les noirs, en quelque sorte). Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il est toujours d'actualité, la "peur d'une France colorée" s'étant massivement exprimée dans les urnes il y a quelques jours...

 

J'hésitais à placer la vidéo de l'incontournable Fight The Power, ce qui sera peut-être (malheureusement) plus pertinent après le 6 mai (néanmoins, vous pouvez la visionner ici). J'opte plutôt pour Burn Hollywood Burn, où Chuck D. (le leader de Public Enemy), est suivi par deux guests de luxe, Ice Cube et Big Daddy Kane :   

 

 

...
 
Public Enemy - Fear of a Black Planet

1. Contract On The World Love Jam
2. Brothers Gonna Work It Out
3. 911 is a Joke
4. Incident at 66.6 FM
5. Welcome To The Terrordome
6. Meet The G That Killed Me
7. Pollywanacraka
8. Anti-Nigger Machine
9. Burn Hollywood Burn
10. Power To The People
11. Who Stole The Soul
12. Fear Of A Black Planet
13. Revolutionary Generation
14. Can't Do Nuttin' For Ya Man
16. Leave This Off Your Fuckin Charts
17. B Side Wins Again
18. War At 33 1/3
19. Final Count Of The Collision Between Us And The Damned 
20. Fight The Power 


Autre chronique :


Public Enemy - How you Sell Soul to a Soulless People who sold their soul

 
 
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2 avril 2007 1 02 /04 /avril /2007 16:06

Hip-Hop        03/2006   Def Jux ****

Si vous pensez que la musique, dans un morceau de rap, se limite à un sample piqué sur un disque de funk... le dernier El-P vous prouvera le contraire. D'une richesse étonnante, la plupart des morceaux de l'album foisonnent d'inventivité, de sons, et ceux qui parlent sans connaître de la "pauvreté musicale" du rap en seront pour leurs frais. L'album contient beaucoup plus d'idées que n'en auront eu pas mal de groupes de rock dans toute leur carrière. Mais pas de virtuosité gratuite ou de démonstration ici, la profusion n'a qu'un objectif : terrasser l'auditeur.  

Si vous pensez que le rap, ce sont des types qui font la fête autour d'une piscine et parlent de grosses bagnoles en draguant des bimbos siliconnées... rien de tout cela dans I'll Sleep when you're dead, qui ressemble plus à la bande-son de l'apocalypse qu'à la bande-son de vidéos hip-hop calibrées pour MTV.

Si vous pensez que les rappeurs sont fermés sur eux-mêmes... El-P a collaboré sur cet album avec des artistes aussi différents que Trent Reznor (Nine Inch nails), Chan Marshall (Cat Power), The Mars Volta, Matt Sweeney, et TV on the Radio. Du beau monde, donc...

Si vous pensez que la seule référence cinématographique des rappeurs est Scarface... l'album s'ouvre sur un texte tiré de Twin Peaks de Lynch (ce qui n'est pas pour me déplaire...)  

Si vous pensez qu'il n'y a pas de zolies mélodies sentimentales dans le rap... là, ce n'est pas ce disque qui vous démentira. Pas de joliesse, mais une puissance et une tension démentielles. A un point tel qu'il faut être en bonne forme pour l'écouter sinon, on en ressort essoufflé au bout de 3-4 titres. Il est sur ce point comparable au "chef-d'oeuvre" du rap, Fear of a Black Planet de Public Enemy, disque éprouvant s'il en est par son énergie. Pas de véritable intérêt à écouter en fond sonore I'll sleep when you're dead, c'est une expérience qui se vit toutes baffles dehors, pas un disque "sympa et funky"... Si je ne me retenais pas, je dirais bien que c'est une bombe, une tuerie, un disque qui déchire sa race, ce qui est vrai, mais j'ai passé l'âge d'employer ce genre de termes. Je me contenterai de dire qu'il est sombre, intense, riche et puissant comme peu d'albums le sont, tous genres confondus.

El-P avait déjà marqué le monde du hip-hop avec son précédent album, Fantastic Damage, il place la barre encore plus haut avec cet album magistral.

Pas le titre le plus riche de l'album, mais un excellent titre, le premier single (à écouter fort, où à ne pas écouter du tout) :

Smithereens

 

El-P - I'll Sleep when You're Dead

Tasmanian Pain Coaster
Smithereens (Stop Cryin)
Up All Night
EMG
Drive
Dear Sirs
Run The Numbers
Habeas Corpses (Draconian Love)
The Overly Dramatic Truth
Flyentology
No Kings
The League of Extraordinary Nobodies
Poisenville Kids No Wins Reprise (This Must Be Our Time)

Le hip-hop est en grande forme en ce début d'année : cf le très bon Abandoned Language de Dälek (chronique chez Systool, et sa chronique de l'album d'El-P, ici).

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