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8 août 2010 7 08 /08 /août /2010 12:38

 

Félix Mendelssohn - Symphonie n°3 "Ecossaise" en la mineur, op. 56 (1842), 1er mouvement

 

Compositeur romantique, Mendelssohn reste, par bien des aspects, assez "classique". Musicalement, il n'a pas la profonde mélancolie d'un Chopin, l'introversion d'un Schubert, la fougue ou le caractère aventureux d'un Liszt, la noirceur narcotique d'un Wagner, ni l'audace d'un Berlioz et de tous ceux-là. 

Pourtant, une des oeuvres de Mendelssohn est aussi une des plus emblématiques de l'esthétique romantique. A la question "qu'est-ce que la musique romantique ?", plutôt que de longs discours, il suffirait de faire écouter le premier mouvement de sa 3° symphonie. Tout y est, ou presque. La contemplation et le mystère comme l'intensité fiévreuse et les tourments, lyrisme et dramatisme poussés à leur paroxysme, la mélancolie et les sensations fortes, la finesse et la puissance. Et aussi, d'un point de vue plus formel : la cohérence de l'ensemble et les contrastes. Car tout découle d'un thème, qui ne cesse de varier et se déployer.

 

Malheureusement, je n'ai pas trouvé sur les sites de streaming la version de ce premier mouvement que je préfère, celle de Claudio Abbado. Mais l'interprétation de Karajan qui suit est tout à fait recommandable :

 

 

 

  

 

Une longue introduction, majestueuse, solennelle, contemplative, brumeuse (il souhaitait notamment figurer l'ambiance des brumes écossaises), entre 3 et 4 minutes selon les versions, qui suggère et amène l'exposition du thème principal. Et quel thème ! Un des plus marquants que je connaisse. Autant par sa beauté et son expressivité que sa construction.

Contraste : on passe de l'Andante de l'intro à un Allegro, mais cohérence et fluidité, puisque le thème est basé sur celui de l'introduction et commence tout en douceur. Tourbillonnant, il évolue crescendo, et passe de la plus douce mélancolie aux tourments les plus enfiévrés. A écouter fort (ou au casque), pour en saisir toute la puissance. Les plus tatillons me diront : lorsque la musique s'emballe vraiment avec le tutti orchestral, on sort du thème au sens strict... certes, il faudrait parler plutôt de "groupe thématique" (avant le 2° thème, plus "bohémien"), mais bon, mieux vaut perdre un peu en précision que de tomber dans le jargon... 

 

Le contraste à l'intérieur d'un thème (ou groupe thématique), ce n'est pas les romantiques qui l'ont inventé. Au contraire, on en retrouve plus fréquemment chez les classiques, qui aimaient associer des motifs distincts dans un même thème. Un exemple typique, clair et bref, dans le 4° mouvement de la symphonie n°40 de Mozart :

 

 

 

Le thème commence sur un arpège ascendant en notes piquées, et joué piano, avant de passer tout de suite sur un petit motif qui tourne sur lui-même, en croches liées et en forte.  

 

Les thèmes du premier mouvement de la 3° symphonie de Mendelssohn et celui du 4° mouvement de la symphonie 40 de Mozart illustrent bien ce qui peut différencier le "contraste et la cohérence" dans le romantisme et le classicisme. Le contraste romantique passe le plus souvent par des "sentiments extrêmes"... d'une tendre et douce mélancolie aux tourments les plus violents. Quant à la cohérence et l'homogénéité de l'ensemble, elle se fait en grande partie dans le classicisme par l'architecture, les proportions, la symétrie, alors que les romantiques jouent en général plus sur la variation, le déploiement d'un thème ou la création d'atmosphères. Non pas que le travail formel soit absent chez les romantiques, loin de là (ce premier mouvement de la 3° symphonie de Mendelssohn est d'ailleurs une forme sonate à deux thèmes), mais on ne sent pas un "découpage" aussi net, symétrique et précis que chez Mozart.

Pour caricaturer, on pourrait dire : le classicisme nous donne des repères, le romantisme nous perd. Comme le fait ce thème envoûtant et tourbillonnant de Mendelssohn, qui nous balade d'un extrême à l'autre et semble ne jamais vouloir vraiment se terminer...

 

Le désir d'universalité des classiques (une musique claire avec des repères précis) contre l'individualisme romantique (seules les passions individuelles comptent, peu importe qu'elles semblent excessives ou maladives pour la société)... voilà aussi ce qui se joue lorsque l'on écoute ces deux thèmes de Mozart et Mendelssohn. Mais il n'y a bien entendu pas à choisir son camp, il serait dommage de se priver du génie de l'un ou de l'autre...   

 

 

  

 

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15 avril 2010 4 15 /04 /avril /2010 10:28

Bedroom Community    02/2010

bjarnason-processions.jpgComment faire de la musique contemporaine en 2010 ? Une musique, d'ailleurs, que l'on ne sait même pas comment appeler... "Contemporaine" ? Au sens propre, Britney Spears, c'est aussi de la musique contemporaine... alors que les oeuvres expérimentales des années 60 ou 70 le sont de moins en moins... "Classique" ? On est loin du véritable style classique, qui, en gros, a duré de 1750 à 1820. Et le terme "classique" est peu adapté pour des oeuvres contemporaines ultra-dissonantes. "Musique savante" ? Les musiques des minimalistes et des postmodernes tel Arvo Pärt sont-elles plus "savantes" que le jazz de Coltrane ou les pièces d'Aphex Twin et Autechre ? Bref, une musique dont la pertinence du nom comme de son existence propre a de quoi laisser dubitatif. Car quelle est la pertinence d'un genre musical issu de la plus illustre des lignées (Bach, Mozart, Beethoven, Schubert, Chopin, Liszt, Wagner, Mahler, Debussy et tant d'autres) mais qui n'intéresse plus qu'une toute petite poignée de spécialistes capables de la comprendre ? Une musique inaudible dans tous les sens du terme, diront les plus sarcastiques...  A quoi bon faire de grandes oeuvres, si on ne les destine qu'à la plus petite frange du public, et si leur impact sur la société est quasi-nul ?

Avant les choses étaient plus simples : il y avait la musique populaire, facile, sans grandes ambitions ni prétentions, et la "musique classique", innovante, riche et complexe. Maintenant, les frontières sont plus floues... non seulement la musique populaire (rock, hip-hop, électro etc...) se targue d'ambitions esthétiques et séduit, par ses artistes les plus intéressants (Radiohead, Dälek, Aphex Twin & co), un public qui se dit exigeant... mais en plus, l'idée de la supériorité d'un "grand art" sur un "art mineur" n'est plus aussi ancrée qu'elle ne l'a été. Comment, donc, faire de la musique contemporaine dans un tel contexte ? Faut-il continuer à avancer, comme le préconisait Adorno, à aller toujours plus loin dans l'innovation sans se soucier des attentes du public... quitte à créer des oeuvres totalement incompréhensibles pour le commun des mortels ? Faut-il, comme l'ont fait les compositeurs néo-classiques (ou postmodernes) revenir en arrière (notamment à la tonalité) et proposer des oeuvres plus agréables, qui empruntent au langage des compositeurs du XVIII°, XIX° et début XX° ? Un public un peu plus vaste peut adhérer, mais là, ce sont les plus pointus des esthètes et mélomanes qui refusent de suivre, et considèrent que l'on tombe dans la régression. Faut-il intégrer des éléments rock, pop, électro ? Avec le risque d'être accusé d'opportunisme, voire de racolage...

Face à ces questionnements, la musique de Daniel Bjarnason, jeune compositeur islandais, est tout simplement une des "propositions musicales" les plus intéressantes de ces dernières années. Il parvient à éviter le racolage (pas de "jolies mélodies" pour toucher la ménagère, ni de batteries rock, chant pop ou sons techno pour appâter un public plus jeune, mais quelques rythmes, notamment dans le premier morceau, inspirés du rock et intelligemment adaptés pour violoncelle), évite aussi la régression (c'est de la musique "moderne", pas du collage d'éléments piqués aux grands maîtres du classique) et les expérimentations des compositeurs les plus radicaux incompréhensibles pour 99,9% de la population. La musique de Bjarnason n'est pas une musique "facile", accessible, mais elle a cette ampleur, ce souffle, qui permettent à des auditeurs pas forcément initiés à tous les arcanes de la musique contemporaine de s'y laisser prendre.

Au fond, Bjarnason reprend les choses là où Bartok les avait laissées. Une musique qui ne caresse pas l'auditeur dans le sens du poil (notamment par sa dureté, ses dissonances), mais ne cède pas au sérialisme intégral ou au "tout atonal". Il y a du Bartok chez Bjarnason... dans l'esprit, la vigueur, mais aussi de manière plus concrète dans l'écriture de certains passages. Par exemple quelques brèves frappes percussives à l'orchestre dans le premier mouvement de la suite "Processions" (In Media Res) qui évoquent ceux de la fameuse partie centrale (martellato) de l'adagio de la monumentale Musique pour Cordes, Percussion et Célesta. Du Bartok dans la deuxième suite, mais aussi du Shostakovitch dans la première (Bow to String), où l'on pense aux quatuors du russe (voire à ceux de Gorecki, même si Bow to String n'est pas un quatuor), notamment au génial 8°, avec ces contrastes où le temps musical s'étire, s'étend, se distend, puis au contraire se resserre, s'accélère... Contrastes extrêmes où l'épure et l'étirement temporel succèdent à des tourbillons sonores, à la plus grande nervosité et aux tensions les plus vives. S'il fallait chercher des influences à l'islandais Bjarnason, elles seraient plutôt du côté des compositeurs des pays de l'Est que des compositeurs nordiques. Et si l'on tient à y trouver des éléments spécifiquement islandais... c'est du côté de la nature qu'il faut se pencher. A l'heure où l'on apprend qu'un volcan sème la panique en Islande, un "désert de glace qui pourrait se transformer en fournaise"... une nature sauvage, mystérieuse, indomptable, le feu et la glace, voilà de quoi la musique de Bjarnason est faite. Alternances entre passages glacées qui vous engourdissent lentement, éruptions sonores et flammes dévorantes et tourbillonnantes qui vous saisissent littéralement. Bjarnason ne craint pas la puissance, le lyrisme, l'intensité dramatique et, osons le mot, l'émotion ("mon dieu, mêler encore musique et émotion dans la musique du XXI° siècle, c'est d'un vulgaire !). On ne s'étonnera pas qu'il ait aussi composé des musiques de films (et, accessoirement, fait quelques arrangements pour ses compatriotes de Sigur Ros).

Comment, donc, nommer cette musique ? De la grande musique, dans tous les sens du terme.

 

 

A lire : 

La chronique de Benjamin F. (avec laquelle je suis loin d'être d'accord... certes, sur les conflits et l'écriture souvent "cinématographique" et dramatique de Bjarnason, tu as parfaitement raison Benjamin... mais comment peux-tu déplorer ces tutti orchestraux et ces masses sonores, qui sont d'ordinaire tellement plus excessives dans une bonne partie de la musique contemporaine, où il faut monter le son à fond pour bien entendre une ligne fébrile de violon, et le baisser de moitié lorsque débarquent sans prévenir de fracassantes explosions orchestrales ? Chez Bjarnason, c'est assez bien pensé pour être écoutable sur albums et pas seulement en concert... et puis Benjamin, mon cher Benjamin, comment peux-tu mettre un tout petit 7 à ce chef-d'oeuvre et des flopées de 8 à tant de disques assez communs de pop, rock, metal ?) (Ceci-dit, il faut lire les chroniques de Benjamin F. Très bien écrites et en général très bien vues... c'est pourquoi je me permets de le critiquer dans ce cas précis, je ne comprends pas vraiment ses réserves...) 

 

Daniel Bjarnason - Processions

 

L'album comporte deux suites en trois mouvements (Bow to String et Processions), une en deux mouvements en bonus track (All sounds to silence come), et la pièce pour harpe et percussion Skelja. L'album est en écoute intégrale (enfin, sauf la suite en bonus-track), avec une très bonne qualité sonore, et je vous recommande particulièrement les deux mouvements qui sont, à mon sens, les plus fascinants de l'album (et, de très loin, les deux meilleurs morceaux de l'année), le premier de Bow to String (Bow To String I: Sorrow Conquers Happiness) et le dernier de Processions (Processions III: Red-Handed) : 

  

 

 

Vous pouvez aussi écouter l'album sur son site, et le commander, c'est par ici : Processions 

Son myspace

 

Track List :


1. Bow To String I: Sorrow Conquers Happiness
2. Bow To String II: Blood To Bones
3. Bow To String III: Air to Breath
4. Processions I: In Medias Res
5. Processions II: Spindrift
6. Processions III: Red-Handed
7. Skelja

8. All sounds to silence come I: listen! 
9. All sounds to silence come II
 

 

Bow to String
Sæunn Þorsteinsdóttir: Cello (or 'an infinite number of cellos')
Valgeir Sigurðsson: Programming on 1st movement, Sorrow conquers happiness

Processions
Iceland Symphony Orchestra
Víkingur Heiðar Ólafsson: Piano
Daníel Bjarnason: Conductor

Skelja
Katie Buckley: Harp
Frank Aarnink: Percussion

 

All sounds to silence come performed by the Ísafold Chamber Orchestra

All music Composed and Conducted by Daníel Bjarnason               

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10 décembre 2009 4 10 /12 /décembre /2009 20:55
Gustav Mahler (1860-1911) - Symphonie n°1 en D (dite "Titan", d'après le roman de Jean Paul Richter) , 3° mouvement (1888).

Ah, enfin de la vraie musique subversive sur Art-rock, avez-vous pensé à la lecture du titre. Et vous avez raison ! Parce que de la musique capable de choquer la société et de faire scandale, ça fait longtemps qu'on en a pas entendu (je parle bien ici de musique, pas de textes de chansons). Vous pouvez brailler dans un micro tant que vous voulez, accompagné par un type qui martèle sa batterie comme un malade et un guitariste qui utilise les pires effets de distorsion qui soient, tout le monde s'en tape. Aucune chance de faire la première page des journaux et de déchaîner les passions. Alors que le très beau mouvement lent de symphonie dont il est question ici a été, lui, vraiment scandaleux.

Pour comprendre ce qu'il y a de si "subversif" dans ce mouvement, mais aussi le génie de Mahler en matière d'orchestration (ce qui est tout de même le plus intéressant) autant faire ça bien et nous plonger directement dans l'oeuvre... 

J'ai choisi la version de Bernstein (difficile à dépasser lorsqu'il est question des symphonies de Mahler), même si elle est plus rapide que la normale :




Le mouvement commence par un rythme à deux temps marqué par les timbales, celui d'une marche funèbre... les caractéristiques d'une marche funèbre sont : 
1. Rythme à deux temps (comme pour toutes les marches... logique, essayez de marcher à trois temps...)
2. Tempo lent
3. Tonalité mineure

Rien de scandaleux pour l'instant, des marches funèbres, on en trouve souvent chez les romantiques. Non, ce qui est véritablement dérangeant, c'est le thème qui vient tout de suite après les premiers coups de timbales. Thème qui est celui de la comptine "Frère Jacques" (Bruder Martin). Utiliser un thème de comptine dans une symphonie, c'est original, mais pas de quoi non plus choquer outre-mesure le public. Ce qui a par contre été vraiment mal reçu, c'est que Mahler le transpose en mineur. Ce qui semblait terriblement malsain, une manière de "pervertir" l'innocence enfantine, une morbidité "démoniaque". Mais Mahler va encore plus loin... une des caractéristiques des génies, c'est d'être capable d'aller à l'encontre des règles les plus élémentaires de leur art, non pas juste pour faire les malins, mais lorsque cela leur permet d'appuyer ce qu'ils veulent exprimer. Ainsi, Mahler va commettre ce que certains considèreraient comme une faute d'orchestration de débutant, il va faire entendre le thème tout d'abord aux contrebasses alors qu'il est dans le registre des violoncelles. Ce qui va rendre ce thème encore plus dérangeant, puisqu'il semble "forcé dans l'aigu"... on a l'impression d'un violoncelliste mal assuré, ou mal accordé...
Le thème est ensuite repris en canon (normal, Frère Jacques est un canon), avec entrées successives du basson, violoncelle, tuba basse. Mais ce qui est véritablement remarquable, encore une fois, dans le travail d'orchestration de Mahler, c'est qu'il va réussir un magnifique crescendo orchestral... sans crescendo. Car les instruments ne montent pas en volume, c'est simplement l'ajout progressif de nouveaux pupitres d'instruments qui donne cette impression de crescendo. Un crescendo qui se fait sans montée en puissance, juste en remplissant chaque fois un peu plus l'espace sonore, pour aboutir à cette musique si fantomatique, livide... Autre point intéressant, un contrechant "moqueur" - typique de l'ironie mahlérienne - au hautbois, de 1'09 à 1'23 (mais il revient plusieurs fois dans le mouvement).

2'11 : 2° thème. Un thème aux accents bohémiens... rien de scandaleux a priori. Utiliser des thèmes populaires, folkloriques (ou, du moins, inspirés du folklore), n'est pas choquant pour le public classique de l'époque, les plus illustres compositeurs l'ont fait avant Mahler. Et les romantiques aiment les musiques bohémiennes et tziganes, ils s'en sont souvent inspirés (notamment Liszt, Brahms et Dvorak). C'est une nouvelle fois le travail orchestral de Mahler qui rend la chose surprenante. Car au lieu de l'adapter au style symphonique "classique", il le fait jouer comme on le jouerait à un bal populaire, avec des effets (glissando) que l'on considérait comme "vulgaires", même chose pour le jeu de grosse caisse et cymbales à contretemps (cf. les passages qui commencent à 2'45 et 3'38). Intégrer de beaux thèmes populaires et folkloriques dans une symphonie, c'était très bien, mais payer pas sa place de concert et avoir l'impression de se retrouver face à une fanfare tzigane, ce n'était pas acceptable. Indigne d'une symphonie. 

Mahler, comme Schoenberg un peu après lui, n'était pourtant pas un "provocateur". Son but n'était pas de chercher la nouveauté pour la nouveauté, mais bien de s'inscrire dans la continuité des génies qui l'ont précédé. Ses deux grands modèles étaient Beethoven et Wagner, et, comme eux (puis Schoenberg par la suite), il avait bien compris que le respect de la tradition classique n'était pas de copier ce que l'on faisait avant, mais bien d'innover, d'apporter sa pierre à l'édifice.  

La deuxième partie (5'13 à 7'15), contraste avec la première; elle est en majeur, beaucoup plus apaisée, douce et rêveuse, et l'on y retrouve un très beau thème que Mahler a utilisé dans ses Chants du Compagnon Errant. Enfin, reprise de la première partie (mais une reprise variée). 

Dans le mouvement lent de la première symphonie de Mahler, on a donc déjà tout ce qui caractérise son style :

L'ironie (transposition de Frère Jacques en mineur, son grinçant de la contrebasse dans le registre du violoncelle, contrechant du hautbois, "parodie" d'un orchestre bohémien), une grande mélancolie, le "recyclage" (de thèmes populaires, ou de ses propres thèmes comme c'est ici le cas dans la deuxième partie) et le génial travail orchestral.

Enfin, un dernier mot sur le personnage, un des plus émouvant dans l'histoire de la musique. Son ironie, ce n'est pas du cynisme mesquin, plutôt une "ironie désespérée". Et il avait de quoi désespérer. Sa femme dont il était profondément amoureux - cette salope d'Alma - le trompait avec ce connard de Walter Gropius (lorsqu'il est question de ce pauvre Mahler, je perds toute objectivité), le fondateur du Bauhaus (non, pas du groupe Bauhaus, bande de rockeurs incultes), et il craignait qu'elle ne le quitte... Sa fille aînée meurt en 1907, année où il apprend aussi qu'il a une grave maladie du coeur et où il perd son poste de chef d'orchestre (quand ça veut pas...) Enfin, Mahler était juif. Et cette époque (fin XIX° début XX°) n'a sûrement pas été la plus paisible pour les juifs européens. Cela a été un handicap de taille dans sa carrière, et s'il a tout de même été respecté comme chef d'orchestre (Mahler était un grand perfectionniste, ses interprétations étaient remarquables), il faudra attendre la seconde partie du XX° pour qu'il soit reconnu à sa juste valeur, celle d'un des plus grands compositeurs de l'histoire.  
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