(Je ne sais pas quel est le connard qui a eu l'idée ces battles absurdes et fratricides... ça me fait vraiment mal de voter contre le génial Alice, mais voilà, j'ai une petite préférence pour ce Nick Cave... No More ShallWe Part, donc)
Avec l'arrivée du net et du téléchargement, les amateurs de musique sont devenus beaucoup plus boulimiques, passent d'un album à l'autre rapidement, et prennent beaucoup moins de temps pour les écouter... Voilà une constatation assez peu discutable sur les nouvelles habitudes de consommation de musique, et, pourtant, à nuancer. J'ai ainsi passé deux heures à écouter ce Bandoliers tiré de l'album de Them Crooked Vultures (Josh Homme, John Paul Jones, Dave Grohl, rien que ça...) Non pas deux heures disséminées à droite à gauche, mais bien deux heures d'affilée, avant-hier. Puis j'ai réécouté ce même morceau une bonne vingtaine de fois depuis. Comme quoi, même un fou de musique qui écoute plus de 200 nouveaux albums chaque année peut toujours être vraiment accroché par une chanson. Pourquoi cette fascination pour ce morceau ? J'en sais trop rien. Mais j'ai bien une hypothèse, sans doute que j'y retrouve ce que j'aime tant chez Queens of the Stone Age et que j'ai tant aimé chez Led Zep dans ma jeunesse, du rock qui a de l'ampleur, du lyrisme, mais avec ici ce groove et cette coolitude qui l'empêche de tomber dans le pompeux ou la niaiserie. Tout comme Led Zep qui, malgré les constructions alambiquées et la virtuosité avait suffisamment d'intensité et de groove pour éviter cet écueil. Entre Josh Homme (leader de Queens of the Stone Age, précision pour ceux qui n'auraient pas écouté de rock ces 10 dernières années), Dave Grohl (batteur de Nirvana, pour ceux qui n'auraient pas écouté de rock ces 20 dernières années) et John Paul Jones (bassiste de Led Zeppelin, pour ceux qui n'auraient pas écouté de rock ces 40 dernières années), on a donc un membre de Led Zep et deux fans du groupe qui lui doivent énormément. Bien sûr, Bandoliers ne sonne pas comme le Led Zep des 70's, c'est bien du rock "actuel"... mais ce rock assez "lyrique", groovy, qui évolue intelligemment et emporte l'auditeur est dans une pure lignée zeppelinienne. Le passage instrumental au milieu du morceau avec rythme martial de batterie et mélodie orientalisante a d'ailleurs un petit quelque chose de l'illustre Kashmir. Un mot, aussi, sur l'excellente partie de batterie de Dave Grohl, qui vaut à elle-seule l'écoute du morceau... il faudrait vraiment que quelqu'un se décide un jour à dire à Dave de rester derrière les fûts et ne plus en bouger, et de renoncer ainsi aux conneries du genre Foo Fighters. La partie de basse de John Paul Jones comme les guitares et le chant de Homme sont tout autant remarquables : pas de démonstration, juste de formidables musiciens rock très inspirés sur ce titre.
Comme Era Vulgaris, je trouve l'album un peu décevant - pas honteux ni catastrophique, loin de là, il y a plusieurs très bons morceaux -, pas à la hauteur de ce qu'a pu faire Homme jusqu'à l'excellent Lullabies to Paralyse... mais avec chaque fois un morceau qui m'obsède totalement et que je ne peux m'empêcher d'écouter et réécouter, c'était River on the Road sur Era Vulgaris, c'est Bandoliers ici.
Them Crooked Vultures - Bandoliers
Peut-être aussi que les chansons actuelles sont moins marquantes, ce qui explique - en-dehors de la boulimie liée à la facilité du téléchargement et l'âge adulte qui fait que les morceaux nous touchent moins profondément que lorsqu'on les découvre ado - que l'on s'y attache moins. Ces trois derniers mois, deux morceaux m'ont obsédé, Liar's Ink du dernier Black Heart Procession, et celui-ci. Mais il faut sans doute remonter à Threads de Portishead, l'année dernière, pour que je retrouve une autre chanson qui ait exercé sur moi un tel pouvoir d'attraction. Alors je serais très curieux de savoir si vous aussi, vous avez été récemment, comme dans votre jeunesse, obsédé par une chanson... et si oui, laquelle...
Comme tout bon amateur de rock, lorsque j'entends le mot hype, je sors mon bazooka. Et s'il y a bien un groupe "hype", actuellement, c'est The Xx.
Puisqu'il faudra l'intégrer dans le classement des blogueurs, je profite qu'il soit sur musicme pour l'écouter rapidement, histoire de voir s'il mérite un 2 ou un 4. Première approche... putain qu'est-ce que c'est mou ! Du rock neurasthénique pour pauvres petites choses dépressives, vraiment pas mon genre. Comme me le disait encore hierChristophe, mieux vaut réécouter en boucle ce bon vieux Ramblin' Jack Elliott que de perdre son temps avec ce type de musiques flasques pour ados amorphes. Pourtant, au fur et à mesure de l'album, je lui trouvais bien plus de qualités que je ne le prévoyais.
En tout premier lieu, ce qui est plutôt rare pour un groupe hype, pas de racolage ni de maniérisme irritant. Une musique plutôt digne, sobre, élégante, apaisée, toute en finesse : on est loin des conneries hype habituelles. Le revival 80's a été cette décennie au coeur des groupes hype, et The Xx n'y échappe pas avec sa musique évoquant parfois du Cure intimiste, voire les Cocteau Twins... mais au moins eux ne ressemblent pas à de mauvaises versions modernes des déjà mauvais Duran Duran ou Tears for Fears, et c'est toujours ça de pris. S'il fallait les rapprocher d'un groupe plus récent, ce serait sans doute de The Notwist, en beaucoup plus calme. Mais la vraie grande qualité de l'album... c'est cette sensation d'espace. Plus qu'une musique aérienne, c'est une musique aérée, qui laisse de l'espace à l'auditeur. Contrairement aux grosses productions actuelles, elle ne cherche pas à en foutre plein les oreilles à chaque seconde en saturant tout l'espace sonore. Comment font-ils ? Des voix qui sussurent, des tempos modérés, une orchestration très légère... et, surtout, l'idée la plus intéressante du groupe, un accompagnement de guitare sans accords grattés mais par de petites lignes mélodiques, sur une ou deux cordes. Certes, ce n'est pas du contrepoint à la Bach, mais c'est tout de même assez original dans un cadre pop/rock.
Pas étonnant que cet album a priori discret et pas spectaculaire pour un sou parvienne à se faire entendre.... il colle parfaitement au contexte de l'époque et à cette période de crise. Tout est à l'économie (sans même parler du nom de l'album et de la pochette, qui n'ont pas dû demander des heures de brain-storming ni l'aide d'une armée de graphistes), on oublie le superflu et le seul moyen de ne pas se morfondre et sombrer face à un avenir morose, c'est cette légèreté, cette élégance - voire même cette grâce - qui permet de rester debout, même si le pas est mal assuré...