Guillaume Dufay, compositeur franco-flamand (1397-1474)
Répéter, comme je le fais souvent, que la musique n'a pas besoin des maisons de disques, c’est bien, encore faut-il le démontrer. J’ai écrit il y a quelques années un long article sur le sujet, mais, pour les fainéants, il existe une manière beaucoup plus simple de s’en convaincre : écouter ce petit bijou qu’est Par droit je puis bien complaindre et gémir. On a encore un pied dans le Moyen Age lorsque cette chanson a été écrite, la Renaissance n’en est qu’à ses débuts. Pas d’industrie du disque brassant des centaines de millions de dollars, pas de droits d’auteur ; on est à mille lieux de l’accumulation de savoirs, cultures, techniques et technologies de notre époque.
Et pourtant, malgré tout ce qu’on a acquis depuis, non seulement on ne fait pas mieux en matière de chansons, mais on fait quasi-systématiquement pire (et bien pire). Imaginez qu’un voyageur temporel fasse écouter à Dufay les chansons de l’apogée de notre merveilleuse industrie du disque, celles des années 1980… de quoi le décourager à vie : à quoi bon s’emmerder à composer avec tant d’intelligence et de finesse, si c’est pour que la chanson tombe si bas 5 siècles plus tard… de quoi aussi lui faire perdre instantanément tout espoir en l’homme. Nous sommes des barbares. Mais ce n’est pas incurable, pour se soigner, rien de tel que de se plonger sans modération dans cette magnifique chanson.
Je vous recommande particulièrement la très belle version (ma préférée, qui par chance est sur Youtube) d'Emmanuel Bonnardot et l’ensemble Obsidienne :
Et si jamais cela faisait naître chez certains un goût pour les chansons anciennes, je vous conseille vivement d’écouter l’ensemble italien de musiques médiévales La Reverdie, vous trouverez sur Spotify leur album Bestiarium : Animals and nature in the Middle Age, mais tous leurs disques sont vraiment de grande qualité. C’est d’ailleurs grâce à eux que je me suis intéressé il y a de nombreuses années à la musique du Moyen Age, alors qu’elle m’indifférait auparavant. Pour la petite histoire, c’est à la même période, fin des années 90, que je me suis pris de passion pour le rap US… j’aime les grands écarts.
A lire : l'article de Lou