18 juin 2009
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Lorsque vous allumez votre télé et entendez parler d'un sujet sur internet dans un reportage, magazine, journal d'info, vous pouvez être quasi-certain qu'il sera question des "dangers du net". A les croire, le net, c'est un repère de terroristes pédophiles qui volent de la musique et des films en balançant de fausses infos. J'exagère un peu, il est vrai qu'on y montre aussi fréquemment des vidéos "insolites" et plus ou moins drôles de gens qui se ridiculisent. Je récapitule, donc : le net, c'est un repère de terroristes pédophiles qui volent de la musique et des films en balançant de fausses infos... et de crétins qui jouent à vidéo-gag.
Pourquoi cette focalisation permanente sur ce qu'il y a de pire dans le net ?
Tout d'abord, de manière évidente, il y a cette dérive journalistique qui consiste à toujours se concentrer sur l'anxiogène, car rien n'excite et ne fait autant vendre. Ensuite, il y a à mon sens une méconnaissance de ce qu'est vraiment l'internet de la part des journalistes et des politiques. Les politiques, justement, parlons-en... car eux jouent particulièrement avec ces peurs, un moyen de légitimer leur ambition de contrôler ce média libre qui, par définition, leur échappe.
Un parfait exemple, cette "fameuse" pub pour le contrôle parental :
Une pub efficace et assez marrante... mais aussi très tendancieuse. Les fans de jeux vidéos ont protesté à juste titre, ne voyant pas pourquoi on les associe à des pédophiles, hooligans... ils ont raison, mais c'est encore pire que ça, la pub crée l'amalgame, comme si jouer à un jeu de guerre correspondait à laisser rentrer chez soi un robot psychopathe qui allait tout dévaster dans la maison familiale.
Comme le disait Jean-François Copé récemment, Hadopi n'est qu'une première étape, la deuxième est une régulation du web, l'obligation pour les FAI de bloquer certains sites qui seront listés par le gouvernement (LOPPSI 2). Avec comme cible "tête de gondole"... la pédopornographie. La cible idéale, bien sûr, celle qui ne peut que choquer tout le monde. Pourtant, on n'a vraiment pas l'impression que la pédophilie sur le net préoccupe les politiques autant que les désirs des maisons de disques. Hadopi coûterait très cher, mais pas sûr que l'on affecte autant d'argent pour la lutte contre la pédophilie.
Plutôt que d'injecter des millions qui ne changeront rien à la situation des maisons des disques avec la farce grotesque Hadopi, mieux vaudrait les utiliser pour lutter contre les pédophiles, et que la police fasse son travail et les débusque (les sites internet qu'ils fréquentent sont un bon moyen de les traquer). Je ne sais pas à qui ont veut faire croire qu'il est facile de tomber sur ce genre de site sur le net, cela fait des années que je passe beaucoup de temps sur le web, et je n'ai JAMAIS vu la moindre image pédophile. Faut vraiment le vouloir pour accéder à ces sites, le problème n'est pas de les bloquer, mais de faire en sorte que l'on puisse combattre ces gens-là.
Tout cela participe bien de cette méconnaissance du net, de ce mélange d'ignorance et de jeu sur les peurs. Comme si se connecter à internet, c'était inviter pédophiles et terroristes chez soi. Il est assez ridicule de nous alerter sans cesse sur les "dangers du net"... car la vie réelle est, elle, bien plus dangereuse. Vous faites courir de plus gros risques à vos enfants en les laissant monter dans votre voiture qu'en les laissant surfer sur le web, même sans contrôle parental...
La vision du net de la plupart des politiques et médias traditionnels est affligeante. Leur idéal est d'en faire un lieu "familial et marchand", et ils vont pour cela à l'encontre de ce qui fait l'essence du net, de ce qui en fait aussi l'outil le plus démocratique qui soit : un espace de partage, d'échange, de gratuité et de libre expression.
Les politiques se gargarisent sans cesse du mot "démocratie". Pourtant, ce qui les dérangent vraiment dans l'internet, c'est cette démocratie bien plus "réelle" qu'ils ne sont capables de la faire. Certes, il y a plein de conneries sur le net, mais il est justement à l'image du peuple quand on lui laisse la parole. S'il peut être pertinent, généreux, éclairé, il peut aussi être "politiquement incorrect", radical, ou stupide. Si l'on tient tant que ça à la démocratie, il faut accepter d'entendre la parole du peuple, même si elle peut "choquer". Glisser un bulletin dans l'urne une fois tous les 2-3 ans pour des gens qui ne feront pas ce qu'ils promettent, dont on peut n'être d'accord qu'avec un quart de leur programme, ça reste très limité comme "idéal démocratique".
Nadine Morano poursuit en justice une internaute qui a simplement écrit "Hou la menteuse" sous une vidéo dailymotion la concernant. On croit rêver (d'ailleurs, elle a fini par laisser tomber cette plainte... mais pas celle contre des internautes l'ayant traitée de "connasse"). A ces politiques et journalistes enfermés dans leur petit milieu protégé, on aimerait dire "Arrêtez de flipper, les gars, on est juste le peuple. Apprenez à nous connaitre, vous verrez que si l'on est parfois un peu cash, vulgaires, si l'on a quelques gros défauts, on n'est pas si mauvais et crétins que vous ne le pensez".
Des individus qui vont, librement et gratuitement, partager leur savoir, échanger des informations, exprimer ce qui leur tient à coeur ; voilà bien ce qui a fait d'internet un média révolutionnaire et génial. Il est de bon ton de taper sur wikipedia, de laisser à penser que leurs infos ne sont pas fiables ("ça vient du net, ce sont des bénévoles, ils n'ont pas leur "carte de presse", donc ça ne peut être vraiment sérieux...") Pourtant, c'est une des créations les plus géniales de cette décennie. S'il y a quelques inévitables erreurs, la plupart des contenus sont contrôlés, écrits par des spécialistes, et wikipedia est une mine d'information exceptionnelle sur tous les sujets.
Revenons-en, d'ailleurs, à Copé. On l'a pas mal entendu au sujet d'Hadopi, projet qu'il a défendu publiquement et vigoureusement. Il en parlait dernièrement dans l'émission de Ruquier (oui, j'avoue, je ne passe pas tout mon temps à consulter des sites passionnants sur le net, il m'arrive parfois de regarder quelques conneries à la télé...) et j'ai bondi de ma chaise en l'entendant sortir une énormité. Jean Teulé lui dit qu'au fond, quand on était jeune, on copiait de la musique sur des K7, et télécharger c'est un peu la même chose... et il répond en ces termes : "la seule différence, c'est que les enregistrements (sur K7) ne sont pas de même qualité que le téléchargement qui est en fait le disque lui-même... par le téléchargement on a un truc pur et parfait." (la vidéo est ici, c'est autour de la onzième minute). Et là, personne sur le plateau ne bronche, tout le monde (journalistes, animateurs, chanteurs) semble d'accord... alors que n'importe qui connaissant un minimum le sujet aurait répondu "Vous racontez n'importe quoi, la spécificité du mp3, c'est d'être un fichier compressé, il y a donc forcément une déperdition sonore". Si Copé estime que c'est bien là la seule différence, qu'il rejette Hadopi sur le champ, car il n'y a donc aucune différence majeure entre télécharger des mp3 et copier sur K7. Une évidence pour tous ceux qui se sont un tant soit peu penchés sur la question, ou qui ont simplement écouté des mp3. Je n'accuserai pas Copé, qui joue du piano, de n'avoir aucune oreille, il a donc sans doute jamais écouté le moindre morceau en mp3. Pour quelqu'un qui s'exprime publiquement en faveur de la loi Hadopi, c'est assez consternant. Et c'est là où wikipedia est essentiel. Il aurait fallu moins de 15 secondes à Copé - s'il voulait en savoir un tout petit peu sur le sujet - pour aller sur la page wikipedia consacrée au mp3, et il aurait lu dès la deuxième phrase : perte de qualité sonore significative mais acceptable pour l'oreille humaine
Copé peut venir raconter n'importe quoi devant des millions de personnes, sur un élément au coeur du problème auquel il s'attaque, et personne ne le reprend. Aucun contrôle, aucune sanction. Tous ceux qui sont tombés sur l'émission sans véritablement savoir ce qu'est un mp3 imagineront que Copé dit vrai, puisque personne ne l'a contredit. Si, sur mon blog - qui est lu par infiniment moins de personne que n'est regardée l'émission de Ruquier - j'avais le malheur d'écrire dans un article que le mp3 est de la même qualité sonore que l'original, je recevrais dans l'heure une dizaine de commentaires incendiaires d'internautes rétablissant la vérité. Et je perdrais en crédibilité sur le sujet.
Alors avant de penser à contrôler le net, les politiques feraient bien de contrôler ce qu'ils disent et d'aller faire un tour sur le net où les infos sur tout ce qui concerne ces sujets sont bien souvent plus fiables et documentées que les leurs...
Pourquoi cette focalisation permanente sur ce qu'il y a de pire dans le net ?
Tout d'abord, de manière évidente, il y a cette dérive journalistique qui consiste à toujours se concentrer sur l'anxiogène, car rien n'excite et ne fait autant vendre. Ensuite, il y a à mon sens une méconnaissance de ce qu'est vraiment l'internet de la part des journalistes et des politiques. Les politiques, justement, parlons-en... car eux jouent particulièrement avec ces peurs, un moyen de légitimer leur ambition de contrôler ce média libre qui, par définition, leur échappe.
Un parfait exemple, cette "fameuse" pub pour le contrôle parental :
Une pub efficace et assez marrante... mais aussi très tendancieuse. Les fans de jeux vidéos ont protesté à juste titre, ne voyant pas pourquoi on les associe à des pédophiles, hooligans... ils ont raison, mais c'est encore pire que ça, la pub crée l'amalgame, comme si jouer à un jeu de guerre correspondait à laisser rentrer chez soi un robot psychopathe qui allait tout dévaster dans la maison familiale.
Comme le disait Jean-François Copé récemment, Hadopi n'est qu'une première étape, la deuxième est une régulation du web, l'obligation pour les FAI de bloquer certains sites qui seront listés par le gouvernement (LOPPSI 2). Avec comme cible "tête de gondole"... la pédopornographie. La cible idéale, bien sûr, celle qui ne peut que choquer tout le monde. Pourtant, on n'a vraiment pas l'impression que la pédophilie sur le net préoccupe les politiques autant que les désirs des maisons de disques. Hadopi coûterait très cher, mais pas sûr que l'on affecte autant d'argent pour la lutte contre la pédophilie.
Plutôt que d'injecter des millions qui ne changeront rien à la situation des maisons des disques avec la farce grotesque Hadopi, mieux vaudrait les utiliser pour lutter contre les pédophiles, et que la police fasse son travail et les débusque (les sites internet qu'ils fréquentent sont un bon moyen de les traquer). Je ne sais pas à qui ont veut faire croire qu'il est facile de tomber sur ce genre de site sur le net, cela fait des années que je passe beaucoup de temps sur le web, et je n'ai JAMAIS vu la moindre image pédophile. Faut vraiment le vouloir pour accéder à ces sites, le problème n'est pas de les bloquer, mais de faire en sorte que l'on puisse combattre ces gens-là.
Tout cela participe bien de cette méconnaissance du net, de ce mélange d'ignorance et de jeu sur les peurs. Comme si se connecter à internet, c'était inviter pédophiles et terroristes chez soi. Il est assez ridicule de nous alerter sans cesse sur les "dangers du net"... car la vie réelle est, elle, bien plus dangereuse. Vous faites courir de plus gros risques à vos enfants en les laissant monter dans votre voiture qu'en les laissant surfer sur le web, même sans contrôle parental...
La vision du net de la plupart des politiques et médias traditionnels est affligeante. Leur idéal est d'en faire un lieu "familial et marchand", et ils vont pour cela à l'encontre de ce qui fait l'essence du net, de ce qui en fait aussi l'outil le plus démocratique qui soit : un espace de partage, d'échange, de gratuité et de libre expression.
Les politiques se gargarisent sans cesse du mot "démocratie". Pourtant, ce qui les dérangent vraiment dans l'internet, c'est cette démocratie bien plus "réelle" qu'ils ne sont capables de la faire. Certes, il y a plein de conneries sur le net, mais il est justement à l'image du peuple quand on lui laisse la parole. S'il peut être pertinent, généreux, éclairé, il peut aussi être "politiquement incorrect", radical, ou stupide. Si l'on tient tant que ça à la démocratie, il faut accepter d'entendre la parole du peuple, même si elle peut "choquer". Glisser un bulletin dans l'urne une fois tous les 2-3 ans pour des gens qui ne feront pas ce qu'ils promettent, dont on peut n'être d'accord qu'avec un quart de leur programme, ça reste très limité comme "idéal démocratique".
Nadine Morano poursuit en justice une internaute qui a simplement écrit "Hou la menteuse" sous une vidéo dailymotion la concernant. On croit rêver (d'ailleurs, elle a fini par laisser tomber cette plainte... mais pas celle contre des internautes l'ayant traitée de "connasse"). A ces politiques et journalistes enfermés dans leur petit milieu protégé, on aimerait dire "Arrêtez de flipper, les gars, on est juste le peuple. Apprenez à nous connaitre, vous verrez que si l'on est parfois un peu cash, vulgaires, si l'on a quelques gros défauts, on n'est pas si mauvais et crétins que vous ne le pensez".
Des individus qui vont, librement et gratuitement, partager leur savoir, échanger des informations, exprimer ce qui leur tient à coeur ; voilà bien ce qui a fait d'internet un média révolutionnaire et génial. Il est de bon ton de taper sur wikipedia, de laisser à penser que leurs infos ne sont pas fiables ("ça vient du net, ce sont des bénévoles, ils n'ont pas leur "carte de presse", donc ça ne peut être vraiment sérieux...") Pourtant, c'est une des créations les plus géniales de cette décennie. S'il y a quelques inévitables erreurs, la plupart des contenus sont contrôlés, écrits par des spécialistes, et wikipedia est une mine d'information exceptionnelle sur tous les sujets.
Revenons-en, d'ailleurs, à Copé. On l'a pas mal entendu au sujet d'Hadopi, projet qu'il a défendu publiquement et vigoureusement. Il en parlait dernièrement dans l'émission de Ruquier (oui, j'avoue, je ne passe pas tout mon temps à consulter des sites passionnants sur le net, il m'arrive parfois de regarder quelques conneries à la télé...) et j'ai bondi de ma chaise en l'entendant sortir une énormité. Jean Teulé lui dit qu'au fond, quand on était jeune, on copiait de la musique sur des K7, et télécharger c'est un peu la même chose... et il répond en ces termes : "la seule différence, c'est que les enregistrements (sur K7) ne sont pas de même qualité que le téléchargement qui est en fait le disque lui-même... par le téléchargement on a un truc pur et parfait." (la vidéo est ici, c'est autour de la onzième minute). Et là, personne sur le plateau ne bronche, tout le monde (journalistes, animateurs, chanteurs) semble d'accord... alors que n'importe qui connaissant un minimum le sujet aurait répondu "Vous racontez n'importe quoi, la spécificité du mp3, c'est d'être un fichier compressé, il y a donc forcément une déperdition sonore". Si Copé estime que c'est bien là la seule différence, qu'il rejette Hadopi sur le champ, car il n'y a donc aucune différence majeure entre télécharger des mp3 et copier sur K7. Une évidence pour tous ceux qui se sont un tant soit peu penchés sur la question, ou qui ont simplement écouté des mp3. Je n'accuserai pas Copé, qui joue du piano, de n'avoir aucune oreille, il a donc sans doute jamais écouté le moindre morceau en mp3. Pour quelqu'un qui s'exprime publiquement en faveur de la loi Hadopi, c'est assez consternant. Et c'est là où wikipedia est essentiel. Il aurait fallu moins de 15 secondes à Copé - s'il voulait en savoir un tout petit peu sur le sujet - pour aller sur la page wikipedia consacrée au mp3, et il aurait lu dès la deuxième phrase : perte de qualité sonore significative mais acceptable pour l'oreille humaine
Copé peut venir raconter n'importe quoi devant des millions de personnes, sur un élément au coeur du problème auquel il s'attaque, et personne ne le reprend. Aucun contrôle, aucune sanction. Tous ceux qui sont tombés sur l'émission sans véritablement savoir ce qu'est un mp3 imagineront que Copé dit vrai, puisque personne ne l'a contredit. Si, sur mon blog - qui est lu par infiniment moins de personne que n'est regardée l'émission de Ruquier - j'avais le malheur d'écrire dans un article que le mp3 est de la même qualité sonore que l'original, je recevrais dans l'heure une dizaine de commentaires incendiaires d'internautes rétablissant la vérité. Et je perdrais en crédibilité sur le sujet.
Alors avant de penser à contrôler le net, les politiques feraient bien de contrôler ce qu'ils disent et d'aller faire un tour sur le net où les infos sur tout ce qui concerne ces sujets sont bien souvent plus fiables et documentées que les leurs...