Pop-rock 1970 - Harvest *****
Un des disques les plus sous-estimés de l’histoire. Il a beau avoir été sacré album rock de l’année par Rolling Stone (le mag ! ) en 1970, les ventes n’ont pas suivi. Il est certes maintenant reconnu comme un des meilleurs disques rock, mais n’aura jamais touché le grand public.
On a fréquemment décrit les Pretty Things comme un croisement entre les Beatles et les Stones… ce qui est assez juste.
Parachute, c’est le disque idéal pour un cadre consciencieux des majors de l’industrie du disque. En effet, la plupart ont été embauchés pour leur réussite dans la vente d’aspirateurs ou de lampes de chevet et ne connaissent la musique que par quelques tubes écoutés sur NRJ le matin dans leur bagnole. Certains, plus scrupuleux que d’autres, pourraient se dire " Bon, la musique des années 60, paraîtrait que c’est pas juste Johnny, Adamo et Hervé Villard, et qu’il s’est passé 2-3 petites choses de l’autre côté de la manche ". Ne demandons pas l’impossible à ces gens-là, ne leur demandons pas de se plonger dans l’intégrale des Beatles, Stones, Who, Pink Floyd et Led Zep. La tête pleine de chiffres, il ne leur reste plus beaucoup de place pour la musique. Donc un seul album pour avoir une idée de ce qu’a été le rock anglais de l’époque est déjà pas mal. Alors que choisir ? Les Beatles ou les Stones ? Les uns sont trop pop, les autres trop bluesy et n’ont pas le génie mélodique des premiers. Led Zep ? Trop hard et trop aventureux. Pink Floyd ? Trop psychédélique puis trop planant et expérimental. Les Who ? parfois inégaux, et suivre la batterie folle de Keith Moon, c’est vraiment trop exténuant pour un cadre de major
Parachute, c’est le meilleur du rock anglais 60’s condensé en un album. Dans le morceau d’ouverture, Scene One, on retrouve (justement) un jeu de batterie à la Keith Moon (mais, si cela peut te rassurer, cher cadre, la batterie se calmera sur les morceaux suivants). Sur les titres qui suivent on a pêle-mêle des mélodies imparables et des harmonies beatlesiennes à plusieurs voix (dans l’esprit du sublime Because des 4 de Liverpool), du blues-rock teigneux et accrocheur (les indispensables Miss fay Regrets, Cries from the midnight circus et Sickle Clowns), des ballades et des envolées lyriques ou psychédéliques inspirées…
Le risque dans ce genre d’albums, c’est qu’il soit trop disparate, qu’il aille dans tous les sens, qu’il ressemble à une suite de copiés-collés. Mais ce n’est ici pas le cas. D’un certain point de vue, il peut faire penser à OK Computer de Radiohead, autre album qui marie et s'approprie des influences rock très diverses, sans perdre en homogénéité et en ne donnant jamais l’impression d’un " hommage " poussiéreux. Chez les Pretty Things, il n’est de toute façon pas question d’hommage puisque les années 60, ils les ont vécu (ils ont sorti leur premier album en 1965, Parachute est leur 5°… mais le plus réussi, devant l'excellent et novateur SF Sorrow, premier opéra rock de l'histoire). A propos d'OK Computer… il y a une petite descente, qui fait office de transition dans Paranoid Androïd (sur " What’s this ") très proche de celle d’In the Square des Pretty Things.
Mettre en avant tel ou tel titre de Parachute, c’est le même dilemme que pour un album des Beatles… Sur les 13, difficile de ne pas en sélectionner au moins 11… Comme chez les Beatles, à chaque titre (ou presque), on se dit " celui-ci, c’est incontestablement le meilleur de l’album ! "
Comment se fait-il alors qu’une telle collection de pop-songs n’ait pas plus touché le public ? Certains parlent de la pochette ratée… c’est vrai qu’elle est particulièrement terne. En fait, c’est un peu tout l’habillage qui ne " colle pas ". Pochette, titre de l’album… voire même le nom du groupe, qui pourrait évoquer une bande de petits minets anglais lisses et proprets, alors que les Pretty Things sont un groupe chaotique de " bad boys ". Les problèmes de drogue et les tensions entre les musiciens participent souvent de la " légende " et de l’attraction d’un groupe, certains savent les utiliser et les surmonter, mais ils ont sérieusement miné la carrière des Pretty Things.
Beaucoup de points communs entre Parachute et Forever Changes (1967) de Love (groupe américain). Les deux n’ont pas connu le succès malgré une qualité rare et un potentiel hallucinant de tubes… qui n’a jamais été exploité.
Site en français consacré aux Pretty Things :
http://www.theprettythings.com/
Très bon article sur SF Sorrow, l'autre chef-d'oeuvre des Pretty Things, ici (chez PlanetGong).
Pretty Things - Parachute
1. Scene One
2. The Good Mr. Square
3. She Was Tall, She Was High
4. In The Square
5. The Letter
6. Rain
7. Miss Fay Regrets
8. Cries From The Midnight Circus
9. Grass
10. Sickle Clowns
11. She's A Lover
12. What's the Use
13. Parachute