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Classements d'albums

4 mai 2006 4 04 /05 /mai /2006 21:24

09/05/2004 - 4AD  *****

Un chef-d’œuvre. Le genre de disques qui vous oblige à faire une chronique ridicule. Soit parce qu’on tente de retranscrire l’incroyable fascination qu’il provoque, son exceptionnelle puissance expressive – ce qui entraîne une débauche de superlatifs pompeux et boursouflés. Soit parce qu’on essaie d’être modéré, de ne pas se laisser emporter, ce qui crée un décalage absurde entre le génie de l’œuvre et la platitude du commentaire... comme si un type, ayant enfin un rendez-vous avec la fille de ses rêves, celle dont le moindre geste le charme et l’ensorcèle au plus haut point, n’arrivait qu’à lui parler… des fonctionnalités de son téléphone portable.

Parler d’un disque qu’on adore, c’est toujours un peu comme déclarer sa flamme. Ne pas être trop expansif, ne pas gueuler " Je t’aimeuh ! " ou "  Que je t’aimeuh ! " comme les 2 autres pénibles lourdauds, sans non plus faire preuve de trop de pudeur ou de retenue.

Pourtant, j’admets qu’il est possible de ne pas aimer ce disque. Il est tellement sombre, expérimental, fou, la voix de Scott Walker est si particulière… possible de ne pas l’aimer, mais impossible d’y être insensible, de ne pas remarquer ses qualités extraordinaires et de ne pas s’incliner devant un tel génie. Le mot est lancé. Mot que j’ai toujours du mal à employer pour le rock ou la pop, difficile de désigner par le même terme un groupe de rock et les indiscutables génies que sont De Vinci, Michel-Ange, Shakespeare, Bach, Mozart, Beethoven etc… Mais Scott Walker a droit à une dérogation. Un album aussi intelligent, inventif et saisissant… Quand on passe les ¾ de son temps dans la musique, qu’on entend des tas de bons, très bons et d’excellents albums et qu’on se retrouve assommé par un OVNI qui vous fait dire toutes les deux secondes " hallucinant ! ", on n’a plus le moindre scrupule à utiliser les qualificatifs les plus élevés. Et à se prosterner religieusement… tant pis pour la retenue…

Tous les titres sont exceptionnels. Pas des pop-songs de 3-4 mn avec 1 ou 2 idées, mais des morceaux riches, denses, intenses, captivants et complexes, dépassant les 6 mn pour la plupart et allant jusqu’à 10 et 12 mn. Scott Walker déborde de créativité. A un point que c’en est insultant pour les tacherons, les groupes honnêtes, et même les très bons. Orchestrations, harmonies, chant, rythme, structures, ambiances… il est hors du commun à tous les niveaux.

Scott Walker avait déjà frappé un grand coup avec le génial Tilt (son précédent album, sorti il y a plus de 10 ans), il récidive avec un album encore plus abouti. Tilt n’était donc pas indépassable. Mais ce ne sont pas ses seules réussites. Je recommande chaudement, pour découvrir sa première période, moins expérimentale et néanmoins remarquable, l’excellent best-of 1967-1970 truffé de perles pops inoubliables.

 

En conclusion… The Drift est déjà le disque de l’année… voire du siècle si la concurrence ne se démène pas sérieusement.

Clip de Jesse sur le minisite consacré à The Drift (allez sur video, en bas de la page).

Article consacré à Scott Walker - plus particulièrement à l'album Climate of Hunter - sur l'excellent blog Chants éthérés. Vous y trouverez aussi un lien vers des retranscriptions (textes + accords) de bon nombre de ses meilleurs titres.

Longue interview (en anglais) accordée à Wire, ici

L'album en écoute intégrale sur deezer.

Scott Walker – The Drift

  1. Cossacks Are
  2. Clara
  3. Jesse
  4. Joson and Jones
  5. Cue
  6. Audience
  7. Buzzers
  8. Psoriatic
  9. The Escape
  10. A lover loves

 

 

 

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commentaires

G
C'est sûr... il devrait d'ailleurs, comme sur les médicaments, tout un tas de contre-indications médicales au dos de l'album !
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T
Je tiens néanmoins à préciser que nous étions alors fermés au public. Je n'ai pas spécialement envie de voir monter le taux de suicide dans la région lilloise !<br />
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G
Thierry... passer The Drift à son boulot et à son patron, faut oser le faire ! Bon, il est vrai que tu bosses dans une médiathèque... ce qui offre tout de même des avantages. Dans les 3/4 des autres boulots, un type qui ferait écouter un OVNI comme The Drift à ses collègues, au mieux, il passera pour un malade mental, au pire il se fait virer illico...
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T
J'ai essayé de passer l'album au boulot tout à l'heure. Mon "boss", pourtant fan du Scott Walker des 60s, m'a demandé si je pouvais l'arrêter. Apparemment, il n'était pas trop dans le trip aujourd'hui. Enfin, hier ... Et je peux le comprendre facilement !<br /> Tu n'as pas à me remercier de faire vivre tes anciens articles. C'est tout à fait normal. Pourquoi se contenter du dernier article alors que ton blog est très riche ?<br /> @++<br />  
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G
Salut Thierry,<br /> Découvrir le Scott Walker "actuel" après celui des années 60, ça doit être un sacré choc. Je l'ai découvert par Tilt, je suis après allé écouter ses albums des années 60, et j'aime ces deux périodes, complètement opposées. Il était génial dans la pop 60's élégante, il est génial dans l'expérimentation torturée...<br /> Le passage "donaldduckien"... je vois tout à fait ce que tu veux dire ! ça pourrait presque être comique... si ce n'était pas si terrifiant... terrifiant, mais fascinant.<br /> Bonne nuit, et merci à toi de contiuer à "faire vivre" mes anciens articles !
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T
Je viens de réécouter "The Escape", histoire de faire de beaux rêves. Ah ! Ce passage donaldduckien à la fin, c'est quand même quelque chose !
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T
Salut G.T., admirateur sans borne des Scott 1 à 4, j'ai connu quelques difficultés à rentrer dans l'univers très sombre de "The Drift". Et finalement, au bout de la 5ème ou 6ème écoute, j'ai vu la lumière grâce à "The escape". <br /> Depuis, c'est une écoute minimum par mois.<br /> Qui aurait cru qu'il aurait pu faire encore plus sombre que "Tilt" ?<br />  
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G
Scott Walker, c'est comme se baigner dans l'eau glacée. C'est très difficile au début... et encore plus quand tu es dedans. J'exagère, tout de même, mais c'est vrai que ce monumental "The Drift", comme le non-moins monumental "Tilt", est pas le genre d'album qui s'apprivoise facilement (sauf pour ceux qui, comme moi, aiment la musique "sombre et glacée"). Et il ne faut pas faire l'économie de ses très beaux albums de "pop soyeuse" des années 60.
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C
ah mais dis-donc, Scott Walker par-ci, Scott Walker par -là, j'entend parler que de lui en ce moment et je connais toujours pas. Allez, c'est parti, je m'y mets.
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G
Là aussi, entièrement d'accord avec toi !
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C
oui, l'album le plus barré de tous les temps, et une des plus grosses claques de ma courte vie. À écouter seul, sans fin !
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G
Entièrement d'accord avec toi, Bob...
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B
Scott Walker est un grand héros de la pop. Il est passé d'un boys band spectorien de grande qualité à une carrière solo splendide pour finir en sorte de David Lynch pop, dynamitant tout les codes en vigueur, créateur d'opéras mentaux de toute beauté. A la lecture de ses récentes interviews, la grande nouvelle c'est qu'il compte faire prochainement de la scène...
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G
Merci !<br /> <br /> Tu as raison, je comprends tout à fait que ce qu'il fait depuis Tilt ne plaise pas à tous, c'est tellement déroutant, étrange... mais on ne peut que saluer une telle audace.
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F
Même si j'ai tendance à préférer ses anciens albums, un p'tit peu plus "lumineux" on va dire (Scott 1, 2, 3 mais surtout le 4 que j'écoute encore en boucle), je dois avouer que Scott Walker est devenu aujourd'hui un des artistes les plus bluffants d'orignalité. 'Tilt' était déjà sombre, spécial, mais ce n'était rien comparé à celui-ci. Neurasthéniques & âmes tourmentés, s'abstenir...<br /> (bonne continuation pour ton blog)
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G
Il y a en effet un rapprochement possible. Mais Scott Walker est à un tel niveau de noirceur qu'il ferait passer Antony and the Johnsons pour Luis Mariano...<br /> <br />
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T
Marrant l'autre jour en écoutant Antony and the Johnsons j'ai pensé à la voix de Scott Walker sur les morceaux calmes style"farmer in the city".Il faut que je me replonge dans Tilt.
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G
C'est l'album le plus barré de tous les temps ! Bon, je sais, j'ai tendance à en faire un peu trop (sauf quand je dis tout le bien que je pense de ton excellent album...)<br /> <br /> Sûr que ça calmerait les fans de Diams un truc pareil. Mais ce serait donner des perles aux cochons. La "génération gnan-gnan" va avoir du mal à "kiffer la vibe" avec Scott Walker... <br />
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R
C'est donc l'album le plus barré de cette année. Je te jure, y'a Bela Lugosi qui a envahi de l'âme de Scott Walker. Excellent.<br /> A recommander aux fans de Diam's.
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L
un peu parcouru ton blog...niveau ciné depuis que tu as écris ta chronique la politique a fait une entrée plutot surprenante dans la production du cinéma populaire avec Les Brigades du Tigres et OSS 117. Le premier n'est pas terrible mais ça fait du bien de revoir Bonnot. Le second est surprenant de qualité, avec une étrange impression de suivre Douste Blazy à l'étranger.
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G
Je te réponds dans les commentaires de l'article sur l'exception culturelle....
G
Jesse est en effet très sombre (et superbe)... mais ce n'est pas la plus saisissante, il y a des morceaux bien plus déroutants sur l'album !<br /> <br /> J'avais oublié le lien vers la vidéo, qu'on peut trouver sur le minisite "thedrift", je vais le rajouter...<br /> <br /> A plus !
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K
je suis en train de découvrir le clip vidéo de "Jesse" (que j'ai pu télécharger de façon officielle), vraiment très noir, très sombre et tout à fait dans la lignée de "Tilt" de façon évidente et aussi de sa BO méconnue pour "Pola X" (que j'ai acquis récemment à un prix vraiment pas donné.... le CD étant épuisé depuis des lustres)<br /> <br /> A +
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