Quand j’entends les mots " chanson française ", je sors mon revolver… Cela a été le cas de très nombreuses années. Et pas seulement pour les pénibles Sardou, Obispo, Johnny, Pagny et compagnie… mais aussi pour Brassens, Brel, Ferré et Gainsbourg ! J’avais beaucoup de mal avec Gainsbourg, car je n’en connaissais que les tubes dont la plupart sont loin d’être ce qu’il a fait de mieux. Mais la découverte de L’histoire de Melody Nelson a été un choc. Qui m’a fait revenir sur certains de mes préjugés.
Je vous entends, de l’autre côté de l’écran, me dire " On s’en tape ! Nous raconte pas ta vie, il y a des milliers de blogs insipides faits pour cela... " Vous avez raison, chers lecteurs, mais cette précision s’imposait, car il faut bien que j’avoue être encore loin d’écouter régulièrement de la " chanson française ", loin de prétendre en être un fin connaisseur.
Faut dire aussi qu’entre la soporifique nouvelle scène française, le rock alternatif binaire et la varièt’ lourdingue, on n’est pas gâtés. Heureusement, quelques-uns sortent du lot. Et Dominique A en fait partie. Sans conteste un des plus talentueux et attachant.
Talentueux et attachant parce qu’il a, dans les années 90, apporté quelque chose de véritablement nouveau, sans pour autant la ramener. Attachant parce qu’il suit son chemin et qu’on ne le retrouve jamais là où se retrouvent en masse les autres chanteurs français. Attachant parce que c’est un écorché vif qui a l’élégance de ne pas sortir ses tripes sur la table, de ne pas prendre la pose de l’artiste incompris, de ne pas hurler ses douleurs en estimant que la terre entière doit cesser de tourner pour les écouter. Il est plutôt discret, modeste, loin du cynisme ambiant. Sa fragilité, ses visées esthétiques il les assume et les incarne sans jouer le systématique clin d’œil appuyé aujourd’hui de mise. Il n’est pas dépourvu d’humour, de légèreté, de distance, mais son désir, c’est faire de la musique, pas le gros malin dans les médias. Il a des ambitions autres que de simplement amuser la galerie, comme le font Bénabar ou Anaïs, et c’est tant mieux.
Venons-en (enfin !) à son dernier album. Première constatation… L’horizon est un très bon cru. C’est dire s’il est réussi, tant Dominique A nous a habitué à un haut niveau de qualité. Peut-être un peu tôt pour le comparer à son précédent album, Tout sera comme avant, aux orchestrations indépassables. Mais aux premières écoutes, L’Horizon n’a pas à rougir face à son génial prédécesseur. Suffit de savoir que c’est du Dominique A pour comprendre que le risque de tomber sur un disque moyen ou médiocre est quasi-nul. Peu savent aussi bien que lui marier la gravité à la légèreté. Grave par sa mélancolie, son exigence, son refus de la mièvrerie et des paillettes. Léger par sa voix aérienne, ses orchestrations subtiles, ses mélodies d’orfèvre. Le single Dans un camion n’est pas son meilleur titre, mais il est en bonne compagnie, avec plusieurs perles. Mention spéciale aux 4 titres en " R ", La Relève - Rouvrir - Retour au quartier lointain et… un trésor, une vraie perle rare, un morceau touché par la grâce, comme jamais ne le sauront les chansons des poids lourds (et légers) de la varièt’, l’incroyablement émouvant (l’expression n’est pas très heureuse, mais " émouvant " est trop faible) Rue des Marais. Loin, très loin au-dessus des rengaines larmoyantes qui font le bonheur des radios et télés.
1. L’horizon
2. Rouvrir
3. Dans Un Camion
4. Antaimoro
5. La relève
6. Retour au quartier lointain
7. Music Hall
8. Par l’ouest
9. La pleureuse
10. Rue des marais
11. Adieu Alma