Electronica 2004 - DC-Recordings
Une des plus belles réussites de la musique électronique de ces dernières années. Et même, allons-y carrément, une des plus belles réussites du genre. Alors il est d’autant plus nécessaire de mieux faire connaître cet album, qui n’a vraiment pas eu " l’écoute " qu’il mérite.
De plus, il est beaucoup plus accessible que la plupart des productions électroniques " exigeantes ", sans être esthétiquement plus faible.
Sa première grande qualité, c’est d’arriver à être rêveur et planant sans n’être jamais monotone (monotonie que certains peuvent reprocher à Boards of Canada, auxquels on pense ici par endroits). Beaucoup de diversité, de trouvailles sonores et de changement d’atmosphères (on y passe allègrement de morceaux très aériens et sereins à d’autres plus inquiétants et instables). Mais pas de virtuosité vaine. Rien de ce que l’on peut reprocher à un grand nombre de premiers albums du genre. Il ne part pas dans tous les sens, dans une surabondance incontrôlée. Car si Aphex Twin, lui, manie à la perfection l’art du " cafouillage ", du chaos et de l’excès sonores et rythmiques, ce n’est pas forcément le cas de tous ses clones. Loin de ceux-là, Sea inside body est peut-être varié, riche, ludique et foisonnant d’idées, il n’en reste pas moins très organique et cohérent. On n’a pas ici l’impression, comme c’est parfois le cas, d’être face à un bricoleur un peu fou qui ne sait pas trop lui-même où il va et ce qu’il fait, mais plutôt d’être face à une œuvre aboutie, inspirée et maîtrisée.
Si cet album est tout à fait accessible à un public plus nombreux que celui des fanas d’Aphex Twin, Autechre ou Squarepusher, c’est qu’il " ose la mélodie " (il faut avoir entendu celle, hypnotique et tournoyante, de Knock, Turn). Et contrairement à beaucoup des disques de Warp, le label phare de l’electronica, il ne sacrifie pas le plaisir du son sur l’autel de l’expérimentation. Le son est un matériau travaillé par un orfèvre, pas par un créateur tourmenté qui le triture et torture dans tous les sens. Dans ce plaisir du son, on peut trouver une filiation avec Amon Tobin ou Plaid, sans doute le groupe dont il est, musicalement, le plus proche.
Alors si vous désirez vous initier à l’electronica, ou faire découvrir le genre à des auditeurs quelque peu sceptiques, commencez par Sea inside body, puis plongez dans les chefs-d’œuvre d’Amon Tobin et Spokes de Plaid avant de vous lancer dans les œuvres plus difficiles et déstructurées d’Aphex Twin ou Autechre…